Banlieues : premiers éléments de guerre civile à Argenteuil (et ailleurs)

Des émeutes dans les quartiers dits difficiles, ce ne sont pas les premières auxquelles il nous est donné d’assister. Celles de 2005 restent dans les mémoires. Mais de là à passer aux premiers éléments d’une véritable guerre civile, il y a un pas qui vient d’être franchi à Argenteuil.

Quelle différence entre de simples émeutes et une guerre civile ? La première est une explosion de colère qui éclate de façon sporadique et souvent anarchique. Cette colère est souvent tournée contre le propre cadre de vie des émeutiers, destructions des infrastructures (écoles, médiathèques…), dégradations au sein des immeubles de résidence, saccage du matériel urbain, véhicules brûlés…

La guerre civile commence lorsque la cible des émeutiers devient l’autorité publique à travers ses représentants (forces de l’ordre, pompiers…). Elle devient patente lorsque l’émeute est dument réfléchie et organisée. On ne se procure pas indument des mortiers de feux d’artifices en quantité, on ne les tire pas directement sur les cibles représentant l’autorité par simple hasard ou coup de sang.

Un détonateur trop longtemps retenu qui ne demandait qu’à exploser

Quand de tels faits de guerre organisés surviennent, il est trop tard. Les sermons courroucés des éditorialistes mainstream, les tentatives pour discréditer les mutins, les appels au calme des parents de victimes, les manipulations de l’appareil d’État pour dégager ses responsabilités arrivent trop tard. Pas responsable de la mort à moto du jeune d’Argenteuil clame la hiérarchie policière ? Trop tard ! (Et de toute façon, source uniquement policière, donc irrecevable là-bas.)

La mort du jeune Sabri à Argenteuil n’est qu’un détonateur trop longtemps retenu qui ne demandait qu’à exploser après une longue série de discriminations exercées à l’encontre de la population des banlieues. Voulez-vous un dernier exemple de ce qui provoque une guerre civile ? Que celui-ci se soit passé à Lille et non à Argenteuil ne change rien. Les nouvelles des exactions policières circulent comme des électrochocs météoriques dans les banlieues.

Un mal policier qui gagne l’ensemble du pays

Si encore, il n’y avait que la banlieue. Mais le mal policier gagne l’ensemble du pays et l’exaspération est à son comble. L’incrédulité de l’opinion devant un tel déchaînement, les faux-fuyants débités pour exorciser l’inéluctable ne sont qu’aveux d’échec au goût de cendres. Trop tard.

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.