Voyage dans un pays détraqué 10. Brutale redescente sur terre

Depuis mon dernier billet consacré à mon passage dans le Quercy, je n’avais rien raconté de mon voyage dans un pays détraqué. C’est qu’il est des épisodes de la vie qui ne sont pas destinés à être rendus publics. Ainsi de mon séjour à Aix-en-Provence chez mes amis Gilles et Michèle A. (lui ancien auteur de feu ma maison d’éditions, Le Reflet). Trois jours intenses, mais trop personnels pour être livrés, après lesquels il nous fallut songer à remonter vers notre Bretagne.

Mercredi, comme dit dans le premier épisode de cette chronique, nous primes par les chemins de traverse (pas d’autoroute, pas de voie rapide). Les routes escarpées de l’Ardèche furent vite inondées par des pluies diluviennes et balayées par des vents vicieux. Je ne dirai pas que cela ne présageait rien de bon, j’adore le mauvais temps. Fatigués par les conditions dantesques de ce périple, nous décidâmes de faire étape à Clermont-Ferrand.

Tant la bêtise y dispute au ridicule

Dans l’hôtel où je m’enquérais des tarifs d’hébergement, la fille masquée préposée à l’accueil avait un mal de chien à fixer son attention sur mes questions. Son regard fuyait obstinément vers la droite où, par l’entrebâillement d’une porte, on avait vue sur la grande salle dans laquelle demain matin serait servi le petit déjeuner. Au fond de cette grande salle, un grand écran de télévision. Sur cet écran, Macron. Sous Macron, un sous-titre (c’est dingue cette manie qu’ils ont désormais de sous-titrer en français des propos exprimés en français) : « Le couvre-feu est une mesure nécessaire. »

Il  y a tellement de temps que tout ce que ce Macron dit est sans intérêt, à peine révoltant tant la bêtise y dispute au ridicule. Mais mes amis sur les réseaux sociaux ne semblaient pas l’entendre de cette oreille, vitupérant, hurlant leur indignation, affectant l’ironie pour ne pas perdre pied. Mon voyage harassant avait eu raison de ma patience. Je dormis d’un sommeil de plomb…

La balle est dans le camp des Français, mais sauront-ils en profiter ?

Au matin, le message email d’une lectrice m’interrogeait sur mon silence à propos de cette annonce de couvre-feu. Comment lui répondre que je n’en avais rien à faire ? Au contraire, comment lui expliquer que je jubilais (ou presque) en voyant le petit con donner aussi grossièrement le bâton pour se faire battre ?

En fait, les Français venaient d’être brutalement mis au pied du mur. Ou ils réagissaient, ou ils sombraient. Par son incommensurable bêtise, Macron venait de leur faciliter la tâche. Mais sauraient-ils en profiter ? La balle était désormais dans leur camp.

Le lendemain jeudi, le voyage du retour fut encore plus éprouvant que la veille. Un brouillard à couper au couteau nous priva de la vision des volcans d’Auvergne et du paysage que nous traversions tant bien que mal.

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