Venezuela : Maduro contre-attaque avec deux Petros et une présidentielle

Sous le joug d’un très sévère blocus US, le président vénézuélien Nicolás Maduro a contre-attaqué sur deux terrains sensibles : la finance et la démocratie.

On (lisez les médias mainstream occidentaux) ne l’attendait pas sur ces terrains-là :

  • En créant deux crypto-monnaies – le Petro adossé au prix du pétrole (dont le Venezuela est grand producteur) et bientôt une nouvelle monnaie adossée au prix de l’or – Nicolás Maduro attaque directement la suprématie du dollar US.
  • En avançant l’élection présidentielle au 22 avril 2018, le président vénézuélien profite de l’éparpillement de ses opposants et se place sur un terrain démocratique que ses adversaires occidentaux se croyaient forts de lui contester.

Un double-affront au roi-dollar

Chose promise chose due, le Petro vénézuélien a officiellement vu le jour le 20 février 2018 par le lancement d’une prévente de cette nouvelle monnaie virtuelle au tarif d’un Petro pour le prix d’un baril. Nicolás Maduro :

« J’ai ordonné l’émission de 100 millions de Petro appuyée par toute la richesse vénézuélienne. Chaque Petro aura la valeur marchande d’un baril de pétrole vénézuélien .»

Le plus drôle est que l’affaire semble plutôt bien partie : Nicolás Maduro a estimé les gains de cette prévente à 735 millions de dollars US.

Mais le président ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Il a poursuivit sa contre-offensive en annonçant le lancement dès la semaine prochaine d’un nouveau « petro » qui serait, lui, soutenu par l’or.

Deux manières donc de contester le blocus US basé sur l’hégémonie du roi-dollar – désormais bousculée y compris en Amérique latine.

La coalition anti-Chavez sur l’air de « Tu veux ou tu veux pas ? »

En avançant la présidentielle 2018 au 22 avril prochain, Nicolás Maduro, le « dictateur » vénézuélien (selon l’Occident), a attaqué sur un autre terrain, celui politique de la démocratie, chasse gardée voulait-on (lisez les médias mainstream occidentaux) nous faire croire de l’empire occidental.

Réclamé à cor et à cri par la MUD (Mesa de la Unidad Democrática), coalition des partis anti-Chavez, cette avancée de date ne convient soudain plus à cette opposition. Il faut dire que celle-ci est en pleine désorganisation après une série de défaites… électorales : l’une lors des élections régionales d’octobre 2017 (auxquelles la MUD, donnée vainqueur par les sondages, accepta de participer), l’autre aux élections municipales de décembre dernier (où elle préféra rester à l’écart d’un nouveau camouflet).

Mercredi 21 février, les partis réunis au sein de la MUD ont annoncé qu’ils boycotteraient la présidentielle d’avril. Raison invoquée : il est nécessaire de changer le régime « le plus tôt possible »… mais les conditions électorales ne seraient pas réunies – NB : les sondages donnent le candidat chaviste largement gagnant « même sans tricher » (dixit Félix Seijas, directeur de l’institut de sondage Delphos).

La démocratie ou la guerre ?

Question : face à cette série de revers, financiers d’abord, démocratique bientôt, l’empire occidental (lisez Washington), déjà marginalisé sur le terrain du Moyen-Orient, va-t-il accepter la tenue d’une présidentielle qui pourrait constituer un nouveau camouflet, sur le terrain latino-américain cette fois ? Rien n’est moins sûr.

Sous un fumeux prétexte de différend frontalier, d’inquiétants bruits de botte se font entendre aux frontières brésilienne et colombienne. Rex Tillerson, secrétaire d’État américain à la défense, s’est récemment déplacé en Colombie à ce sujet. Le Maritime Herald du 12 février rapporte que des troupes américaines viennent d’arriver dans des bases colombiennes. Et le Brésil, dirigé par Michel Temer, président intérimaire très pro-américain, a annoncé son intention de « doubler ses patrouilles frontalières vénézuéliennes ».

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