Venezuela : l’interdiction d’un parti qui n’existe pas

Même Le Média s’y est laissé prendre. Dans le cadre de la présidentielle anticipée qui se déroulera le 22 avril prochain, la Cour suprême de justice vénézuélienne (TSJ) aurait exclu « la principale coalition d’opposition » du scrutin… sauf que cette coalition n’existe pas !

Au Venezuela, ne peuvent participer à des élections que des partis officiellement déclarés, reconnus avant le scrutin et satisfaisants à deux conditions :

  • ne pas reposer sur un « double-militantisme » (les candidats ne peuvent être inscrits que dans une seule organisation officiellement reconnue) ;
  • avoir déposé ses statuts et justifier d’une structure organisationnelle formelle (présidence, secrétariat général, etc.).

NB : ces règles n’ont pas été sorties du chapeau pour l’occasion, mais ont été finalisées dans le dispositif numéro 4 de l’arrêt n° 1 du 5 janvier 2016 et dans l’article 32 de la Loi sur les partis politiques.

Une coalition fantôme

Or, la MUD (Mesa de la Unidad Democrática), qui vient d’être retoquée par la TSJ, ne présente à ce jour aucune de ces deux conditions :

  • la MUD est une coalition de circonstance présentée au débotté par plusieurs partis d’opposition déjà officiellement existants (d’où le cas de double-militantisme pointé par le TSJ pour justifier sa décision) :
  • la MUD n’a actuellement aucun statut déposé, ni aucune structure organisationnelle formelle existante.

En réalité, l’opposition vénézuélienne existante est parfaitement avérée à se présenter à la prochaine présidentielle, soit en ordre dispersée, soit en se regroupant derrière le candidat d’un des partis d’opposition existants – Acción Democrática (AD), Primero Justicia (PJ)… – mais pas en présentant opportunément au dernier moment une organisation encore fantôme pour les deux raisons évoquées ci-dessus.

En conséquence, parler d’une organisation informelle inexistante comme de « la principale coalition d’opposition » et laisser entendre que l’opposition se verrait interdite de présidentielle par la décision d’une cour de justice « acquise au président socialiste » est donc légèrement abusif, cher Média  😉

=> Lire aussi : La MUD y las elecciones en Venezuela : crónica de un “partido” que nunca existió

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