Un programme socialiste à côté de la plaque

Si vous prenez une à une les propositions du programme socialiste, à part quelques mesurettes pipeau (le CV anonyme), quelques déclarations d’intention convenues (l’égalité homme-femme), quelques projets tous freins serrés (la sortie en 20/30 ans du « tout nucléaire »), à part tout ça, oui, elles pourraient à la rigueur séduire. À la très extrême rigueur !

Car considérées comme éléments d’un tout cohérent et replacées dans le contexte de la Grande Crise, c’est une autre paire de manches !

Le PS ne s’attaque pas aux causes de la crise

S’ils arrivent au pouvoir en 2012, les socialistes, avant de plafonner les salaires des dirigeants d’entreprises publiques, devront d’abord trouver les moyens d’assurer les émoluments de tous les autres fonctionnaires.

Avant de recruter 300 000 emplois-jeunes, de « requalifier les stages en contrats de travail », il faudra d’abord qu’ils empruntent dare-dare sur les « marchés » de quoi sauver en urgence tel ou tel autre nouveau pays européen en souffrance.

Ils pourront fusionner tous les impôts/CSG qu’ils veulent, créer des TVA « écolo-modulables », balancer un salarié dans tous les conseils d’administration, rien n’y fera s’ils ne s’attaquent pas D’ABORD aux causes réelles de la Grande Crise :

  • la dérégulation financière sauvage ;
  • une dette publique apoplectique.

Or rien de tout cela ou presque (quelques taxettes sans conséquence) dans le programme de gouvernance socialiste.

Prendre le taureau de la Grande Crise par les cornes

J’ai pour ma part relevé cinq conditions pour voter à la présidentielle de 2012. Ces conditions ne sont pas des lubies hallucinatoires dans un esprit échauffé, mais obéissent à deux considérations basiques :

  • respecter les droits de l’homme élémentaires et les trois principes d’égalité, liberté, fraternité : un revenu minimal décent pour tous, un revenu maximal (public ET privé) ;
  • prendre le taureau de la Grande Crise par les cornes : gel de la dette publique, interdiction des spéculations sur les variations de prix, protectionnisme social.

C’est peu de dire que le listing des mesures présenté par Martine Aubry and co ne répond en rien (ou presque) à ces conditions.

On remarquera que les quelques velléités socialistes de s’attaquer aux vraies racines du mal (taxe Tobin sur les transactions financières, lutte « acharnée » contre les paradis fiscaux) sont renvoyées… à des décisions européennes ! Autant dire, on dégage en touche, c’est pas nous c’est les autres.

Une soumission irréaliste à un modèle exsangue

Comme ceux qu’elle prétend remplacer, l’opposition socialiste s’obstine dans la même logique de pensée irréaliste, dans la même soumission servile (intéressée ? ) à un modèle moribond : celui qui s’articule autour d’une croissance exponentielle révolue et d’un espoir chimérique de retour au plein-emploi.

Modèle exsangue, logique meurtrière dont nous subissons désormais au quotidien les conséquences :

  • l’épuisement des ressources naturelles qui fondent le modèle en question ;
  • les ravages de nos excès irraisonnés (fuite pétrolière dans le Golfe du Mexique, accident nucléaire de Fukushima, pollution chronique des villes…) ;
  • les dégradations climatiques de plus en plus palpables ;
  • la perversion d’une organisation (financière) complètement déconnectée des réalités économiques.

Une révolution historique est aujourd’hui en cours, dont nous persistons à ne pas vouloir prendre conscience. Celle-ci s’accomplit donc sans nous, contre nous, dans la douleur, imposée par un environnement à bout de souffle et la fossilisation du modèle !

Voilà pourquoi le Parti socialiste (comme tout autre force politique qui ne tiendrait pas compte de cette situation) ne sera bien sûr jamais en mesure d’appliquer un programme totalement à côté de la plaque.

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.