Europe : le Parti de Gauche, la stratégie de la désobéissance (et le boulet du PCF)

Dans une tribune publiée par Marianne le 4 janvier, Guillaume Etievant, chargé de l’économie et du travail au Parti de Gauche, développe une intéressante stratégie de la désobéissance face aux diktats de l’Union européenne. Sa motivation est annoncée sans ambages.

<< Nous sommes depuis longtemps conscients de la nécessité de sortir des traités européens. Toute la difficulté est de trouver la stratégie la plus efficace et qui respecte notre volonté internationaliste. >>

Une démarche internationaliste

Cette stratégie est clairement celle de l’épreuve de force, << dans le respect du suffrage universel >>, au nom des intérêts du peuple français. Si le Front de Gauche arrivait au pouvoir, écrit Etievant, il proposerait à ses partenaires un memorandum sur les directives européennes qu’il refuserait de suivre.

<< Notre stratégie est celle de la subversion au sein des institutions européennes, y compris sur la question de l’euro. Nous sommes prêts à réquisitionner la banque de France pour lui permettre de monétiser notre dette publique s’il s’avère impossible de modifier les statuts de la BCE. >>

Pas contente, l’Union européenne et sa Commission de bureaucrates ? Tant pis, réplique Etievant, qu’ils prennent le risque d’exclure la France, donc de l’explosion de la zone euro.

<< Nous assumons ce risque et ferons le maximum pour coordonner cette politique avec tous les peuples européens qui le souhaiteront. Si la zone euro explose ou même l’Union européenne, ce sera alors sur des bases internationalistes et non des bases nationalistes. >>

Une démarche internationaliste, ajoute Etievant, qui tranche avec le nationalisme étroit revendiqué par le Front national. Car si le cadre politique se fixe toujours au niveau national (par les élections), la lutte des classes, elle, se mène au cadre européen, avec les pays partenaires.

Union de circonstances ou clarté des idées ?

On se prend à se dire que le Parti de Gauche aurait gagné à s’expliquer plus tôt [Jacques Généreux, économiste du PG, évoqua lui aussi une stratégie similaire dans un entretien à Rue89, ndlr]. Sur ce point, Etievant est un peu plus gêné aux entournures :

<< Nous sommes un jeune parti qui tente d’être un creuset des différentes histoires de la gauche pour un jour réussir à être majoritaire dans le pays. Cela nécessite de constants débats en notre sein comme au sein du Front de Gauche. Ce qui peut apparaitre comme « flou » […], c’est simplement le long chemin vers l’unité de la gauche de transformation sociale, qui porte en son sein de nombreuses visions de la nation. >>

Allez, disons-le en clair à sa place, le boulet du Front de Gauche, c’est encore une fois le PCF, avec ses déclarations d’intention fumeuses pour refonder l’Europe de l’intérieur. Parfait pour se poser en opposant pépère palpant au passage les subsides juteux de quelques postes dans un Parlement européen inutile, beaucoup moins pour espérer tirer l’UE des pattes de la Troïka.

<< Prétendre que l’issue à la crise actuelle passerait par une sortie de l’euro et, en fait, par la disparition de celui-ci, est illusoire, voire purement démagogique >> (projet du PCF pour une refondation de l’Union européenne, mai 2013)

Reste à savoir si une union de circonstances au nom de la conquête du pouvoir doit prévaloir sur la clarté des idées. Les résultats des élections partielles montrent que la première n’a guère réussi au Front de Gauche jusqu’à présent. Sur la seconde, les différences apparaissent crument, tant le PCF est accroché à d’autres vieilles lunes (sur le productivisme, le nucléaire…)

Les municipales qui précèdent les européennes, avec ces autres postes à sauver qui conduisent le vieux PCF à une tortueuse navigation à vue, pourraient bien utilement précipiter les clarifications.

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