Tunisie : la première révolution populaire de l’ère numérique

Le peuple tunisien vient de franchir le premier stade de sa révolution : le renvoi d’un pouvoir honni. En attendant le second stade, celui de la reconstruction, une première conclusion s’impose : la Tunisie est en train de mener la première révolution populaire de l’ère numérique.

Les deux armes principales de toute dictature (ou de toute démocratie pervertie, ce qui n’en est jamais très loin) étaient, croyait-on, la maîtrise des moyens de communication traditionnels (télévisions, radios, journaux…) et ceux des contrôles policiers. Ben Ali et son régime y étaient parvenus au-delà de toute mesure.

Les réseaux sociaux dament le pion aux médias officiels

Mais voilà que les armes de la communication classiques se sont fait damer le pion par les outils de communication modernes, les fameux réseaux sociaux : Facebook, Twitter, les blogs, les SMS…

Oh, ces dernières images figées d’un Ben Ali aux abois sur l’écran de SA télévision ! Que ce monde paraissait déjà dépassé, obsolète, dérisoire ! Facebook, Twitter et consorts ont pulvérisé les tentatives désespérées d’un pouvoir visant à pétrifier sa population sous la propagande et la peur.

Pas un des manifestants tunisiens qui ne reconnaisse s’être goulûment servi de ces nouveaux outils numériques. Pas un qui ne nie leur importance stratégique et déterminante dans le déroulement et le succès du premier stade de cette « révolution de jasmin ».

Big Brother prend la pâtée

Nul ne sait comment tourneront les évènements de l’insurrection tunisienne. Bien des incertitudes demeurent, bien des menaces pèsent encore sur le sort de ce peuple courroucé. Mais au moins, son futur est entre ses mains.

Les esprits chagrins, ceux qui annoncent par avance les défaites pour ne pas avoir à mener les combats, qui invoquent Big Brother pour justifier leurs capitulations préventives, en seront pour leurs frais : les réseaux dits « sociaux » viennent aussi de faire voler en éclats l’invincibilité supposée des carcans policiers.

Malgré les proclamations de nos frileux ne jurant que par les fichages et la mise en coupe réglée des individus, Internet et cette arme de subversion massive qu’est le téléphone portable auront contribué à contourner, l’espace de quelques jours de liesse, les derniers remparts surannés d’un régime autoritaire.

Autre chose : le fait que cette première révolution de l’ère numérique ait été menée par des « arabes », ceux-là mêmes que nos beaux-esprits supposaient prêts à se jeter dans les bras de l’islamisme le plus rétrograde, va sans nul doute en faire bisquer plus d’un ! Et amuser les mauvais esprits que nous sommes.

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.