TERRIBLES ORAGES EN PERSPECTIVE

((/public/G20_2.jpg|G20_2.jpg|L))Ils ont beau claironner que tout va « moins mal que prévu », s’ébahir devant la « surprise » d’un petit +0,3% de PIB en juillet (cet ébahissement et cette « surprise » illustrent à eux seuls toute la confusion de leurs prévisions) ; ils ont beau s’enivrer des dernières envolées boursières, d' »indices de confiance » frémissants et voir venir des reprises à tous les coins de rue, ils n’y pourront rien : cette rentrée s’annonce sous les pires auspices pour l’économie réelle. Et pour les populations.

__Des chiffres en trompe l’œil__ On peut toujours se vanter de l’aubaine d’une progression « surprise » du PIB. Mais cela ne signifie rien si l’on ne prend pas en compte que cette progression bien modeste tient presque exclusivement aux aides des États (en dernier lieu, la fameuse prime à la casse automobile), donc à un accroissement de leurs dettes déjà vertigineuses. On peut se féliciter de la stabilisation, sinon de la progression, de certains bénéfices d’entreprises (les bourses, dans leur euphorie quasi psychotique, ne s’en privent pas). Mais doit-on ignorer que celle-ci provient essentiellement des gains des restructurations opérées tous ces derniers mois à coups de dégraissage massifs d’effectifs, et non d’une reprise réelle de l’activité ? Car si les bénéfices s’accroissent artificiellement (à quel coût social ?), les chiffres d’affaires par lesquels on pourrait rendre cette croissance durable restent [désespérément atones|http://www.boursorama.com/opcvm/detail-actualite-opcvm.phtml?num=3c8f11b17a1b9fa122d9ea9e6d42bbdb]. On peut toujours essayer de retoquer la réalité à sa sauce. Cela ne dure qu’un temps. La réalité finit toujours par vous rattraper. En l’occurrence, la réalité est celle de l’économie réelle, seul moteur tangible du système capitaliste et grande pourvoyeuse, via le crédit, des margoulins de la haute finance. __Des obstacles vertigineux sur un horizon bien sombre__ Or cette économie réelle va très mal. Un chiffre, un seul, est venu le confirmer mercredi 26 août, bien plus significatif que tous leurs « indices composites » de circonstances : le fret par chemin de fer s’est encore effondré en juillet, précipitant la SNCF dans [les affres des déficits abyssaux|http://www.lesechos.fr/info/transport/300371613.htm]. Le fret, c’est ce qui mesure précisément le niveau des échanges commerciaux. En pleine panouille comme on le voit. Car les frets maritimes, routiers et aériens ne se portent guère mieux et ne voient toujours pas, eux non plus, le bout du tunnel. Un autre évènement confirme les limites de la fuite en avant par la planche à billets. Les États-Unis et l’Allemagne ont annoncé [la fin des aides|http://www.e24.fr/entreprises/transport/article125424.ece/Allemagne-pas-plus-d-aides-a-l-automobile.html] aux particuliers pour leurs achats d’automobiles. Parions que la France sera contrainte d’en faire autant. Les effets de ces mesures artificielles porteront sans doute encore leurs fruits dans les résultats « moins mauvais que prévus » du troisième trimestre. Mais qu’adviendra-t-il à l’industrie automobile une fois fermé le robinet des aides publiques ? Autres obstacle délirant : [le mur de la dette|http://mobile.lemonde.fr/la-crise-financiere/article/2009/08/25/en-europe-les-etats-et-les-entreprises-vont-etre-confrontes-au-mur-de-la-dette_1231692_1101386.html], qu’elle soit privée ou publique. La masse énorme des crédits souscrits par les entreprises privées (plus de 3 000 milliards d’euros pour les seules firmes européennes entre 2005 et 2007), arriveront à échéance à partir de 2011. Idem pour les titres émis par les Etats pour financer leurs plans de relance. Un signe : exsangue, l’État français vient de refiler le [bâton pourri Natixis|http://www.boursorama.com/infos/actualites/detail_actu_marches.phtml?num=2a032a060e9536b1c3d09be51cd72c7a] et ses quelques 35 milliards d’euros d’actifs toxiques à la pauvre Banque Populaire Caisse d’Épargne (BPCE) pourtant guère mieux lotie. Pendant ce temps-là, le chômage, en France comme ailleurs, poursuit peinard son destructeur petit bonhomme de chemin : [33.300 « victimes » françaises de plus en juillet|http://www.e24.fr/economie/france/article126306.ece/Chomage-10.700-inscrits-supplementaires-en-juillet.html], toutes catégories confondues (et non pas seulement 10.700 en se limitant hypocritement, pour faire illusion, à une seule des quatre catégorie. Une pandémie au moins aussi meurtrière que la fameuse grippe A(H1N1) qui condamne toute une nouvelle génération à ronger son frein. __Des portes de sorties bien étroites__ Justement, parlons-en. Ils ont l’air fin, nos puissants, empêtrés qui plus est dans des pandémies qui pourraient bien provenir de leurs excès imbéciles (où en est-on de l’enquête sur les origines de cette fameuse grippe, autrefois dite « porcine car elle provenait, nous disait-on, d’un des plus grands élevages industriels de porcs au Mexique ?) Quid des dérèglements climatiques qu’ils prétendent solutionner en en faisant juste payer le droit d’accès aux plus riches, et en en repoussant toujours et encore le traitement ? Où en sont-ils des recherches sur les fameuses énergies durables de substitution ? À peine quelques agitations stériles pour tenter de récupérer à leurs profits toutes les échappées belles (le capitalisme « vert »). Le tableau est singulièrement sombre, n’est-ce pas ? Et sans grand espoir de sortie immédiate du pétrin. D’autant que nos dirigeants, qu’ils soient privés ou publics, apparaissent comme singulièrement déboussolés par les évènements. Manifestement, aucun d’entre eux n’a pris, ou n’a voulu prendre la mesure de la gravité de la situation. Aucun plan B à l’horizon. Ils dansent comme pantins hallucinés leur sarabande des faux espoirs et des solutions interminablement repoussées, lancés dans une fuite en avant suicidaire (le futur « grand emprunt national »). Seule leur importe en fait la perpétuation en dépit du bon sens de leurs pouvoirs et de leurs avantages. Une chose paraît irrémédiablement sûre : aucune solution n’émergera, comme ils le prétendent systématiquement pour mieux noyer les poissons, de l’international et de ses grands raouts genre prochain G20 du 24 septembre à Pittsburgh (USA). On a déjà donné ! __Quelques petites bouées pour ne pas se noyer__ D’ailleurs cet « international » n’existe pas véritablement. Juste un prétexte commode pour ne rien faire, sinon illusion. Un regroupement opportun de lobbies sans scrupules, tant publics que privés, pour s’affranchir de toutes les régulations sociales patiemment élaborées au fil des ans par les nations, et laisser libre cours à leur quête effrénée de richesses et de pouvoirs. Réels ou aussi illusoires que l’argent. Peu de solutions non plus au niveau des Etats. Les perspectives politiques y ont les yeux crottés. On mesure les tentatives de certains pays d’Amérique latine comme la Bolivie d’Evo Morales pour construire un modèle original, malgré les infernales pressions du voisin étatsunien. Mais qu’attendre de pays dont les dirigeants sont comptables de l’aide des financiers qui leur ont permis d’accéder au pouvoir (Obama) ? Qu’attendre de ces démocraties étroitement régulées par des médias omnipotents aux mains des puissances d’argent (les nôtres ont déjà commencé les manœuvres sondagières pour imposer, en 2012, un candidat « socialiste » bien convenable à leurs yeux : Dominique Strauss-Kahn, par exemple, actuel directeur du nébuleux FMI, ce qui parle de soi-même). La réaction des populations ? On en est hélas encore bien loin tant celles-ci semblent frappées d’hébétude. D’aucuns seraient tentés de les plaindre, de compatir à leur sort, de multiplier les justifications à leur indolence tenace. Bon, admettons. Mais rappelons aussi que ces populations sont composés d’adultes « responsables », c’est-à-dire en principe maîtres de leur sort. En principe. Ne restent aujourd’hui que les travaux inlassables de quelques chercheurs isolés (Paul Jorion et sa nouvelle [constitution pour l’économie|http://www.pauljorion.com/blog/?p=4244]). Et quelques solutions localisées (les AMAP et autres associations citoyennes), quelques arrangements de gens de bonne volonté, marginaux mais de plus en plus nombreux par la force des évènements (vous allez voir que nos producteurs laitiers vont les rejoindre, eux qui n’auront bientôt plus d’autres solutions que d’échapper à la filière des grands distributeurs). Peu de choses, n’est-ce pas ? Juste quelques combines façon système D pour échapper autant que faire se peut aux terribles orages. C’est déjà ça.

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.