
L’issue des guerres est difficilement prévisible, écrit Robert Fisk dans son dernier billet. Mais la bataille d’Idlib qui s’annonce pourrait bien consacrer la victoire d’Assad (et de Poutine) en même temps que la défaite de la coalition occidentale au Moyen-Orient.
Idlib, dit Fisk, c’est la poubelle des ennemis de la Syrie, là où ont été entassés les combattants d’Al-Nosra, Daech et autres mouvances islamistes après leur évacuation par bus gouvernementaux des précédentes zones de combats perdus par les « rebelles ».
Pendant que se prépare cette bataille décisive de la guerre de Syrie, les manœuvres de propagande vont bon train. Robert Fisk :
« Allons nous assister, dans cette immense tragédie, à un remake de « Berlin 45 » ? Avec des pertes humaines « sans précédent » comme le craint l’ONU ? Une entrée dans Idlib « sans épave » comme le gronde Trump ? À la percée finale de « l’abcès terroriste » dont parle Sergueï Lavrov – reprenant le langage utilisé par Israël à propos du Hamas à Gaza ? »
Où iront les combattants islamistes d’Idlib qui ont juré de ne jamais se rendre ?
Consciente de l’importance de cette bataille et peut-être pressée de prendre sa revanche sur l’humiliation qu’elle avait subi dans le secteur en 2015 face aux troupes d’Al-Nosra, l’armée syrienne a groupé dans le secteur tout ce qu’elle compte de forces et de généraux. Mais pour l’instant, le round est encore à l’observation. « La dernière grande bataille d’Idlib pourrait se révéler plus lente que ne l’imaginent les politiciens – et les rédactions – du monde entier » , écrit Fisk.
La question cruciale qui se pose, continue le journaliste britannique, c’est de savoir où iront les combattants islamistes regroupés dans la poubelle d’Idlib, et qui ont juré de ne jamais se rendre. Le général pro-régime Sultan a prévenu : les islamistes de nationalité syrienne pourront rester, les étrangers devront partir. (On se rappellera à cet instant que les fameux Casques blancs, évacués dans les mêmes bus humiliants que les combattants islamistes défaits, ont été exfiltrés d’urgence en Israël et dans quelques autres pays occidentaux comme le Canada, l’Allemagne ou la Grande-Bretagne.)
Quand aux massacres de civils annoncés à grand cris d’indignation surfaite par les milieux occidentaux, la thèse syrienne – à prendre avec les pincettes qui s’imposent – est que la région d’Idlib n’est plus occupée que par les combattants islamistes et leurs familles.
Une bataille décisive… mais peut-être pas finale (n’oubliez pas le Golan)
Il y a un pan de la propagande occidentale que Fisk n’aborde pas (du moins pas dans ce billet) : l’usage d’armes chimiques par le régime annoncé à cor et à cris par les chancelleries de l’empire déconfit, avec promesses très anticipées mais déjà tonitruantes de représailles aériennes par les États-Unis et ses vassaux européens ou israéliens. Peut-être est-ce parce que l’envoyé spécial de The Independent, présent sur le terrain, sait très bien que ces rodomontades, tout comme les représailles armées exclusivement aériennes, sont la marque de l’impuissance.
Pour ceux-là, l’affront ne risque d’ailleurs pas de s’arrêter à la bataille d’Idlib, décisive, mais peut-être pas finale, explique Robert Fisk. Il est en effet un dernier territoire syrien échappant à l’emprise de son gouvernement officiel : le Golan, actuellement occupé par Israël.
Mais « c’est une autre histoire », conclut Fisk.
=> Source de mes infos : Robert Fisk, The Independent.