
Șerban Savu est né en 1978 à Sighișoara (Roumanie). Il vit et travaille à Cluj.
En 2001, il fréquente l’Université d’art et de design de Cluj (Roumanie), il obtient ensuite une bourse de recherche post-universitaire de deux ans à Venise.
Șerbann Savu appartient au groupe de peintres, connus sous le nom d’école de Cluj, qui émergèrent au début des années 2000 en Roumanie en compagnie d’Adrian Ghenie, Mircea Cantor, Ciprian Muresan, Mircea Suciu et quelques autres.
Romantisme et social réalisme poétique
Șerban Savu, qui a grandi pendant le renversement du communisme, nous offre une mise à jour anti-héroïque du réalisme socialiste. Les œuvres de Savu dépeignent cette transition difficile d’une manière à la fois romantique et mélancolique. Il pratique un “style” réaliste aux formes simplifiées qui renvoie au réalisme socialiste, en outre les motifs employés sont pour la plupart d’ordre social et décrivent avec désenchantement la transition du communisme à une économie de marché et des valeurs propres aux démocraties occidentales actuelles dominées par le néolibéralisme. Ces peintures témoignent d’une époque aujourd’hui révolue, et évoquent les rêves de l’utopie communiste : ces paysages urbains, qui semblaient ouvrir la voie à un avenir radieux, sont en quelques années devenus des reliques. Le peintre documente les vestiges de l’ère communiste comme des traces non seulement de leur histoire, mais aussi comme une partie de leur identité et de l’héritage compliqué pour la nouvelle génération de Roumains.
Usines abandonnées, structures communistes ou vieilles voitures sont placées au sein d’un décor de la Roumanie contemporaine, où la vie semble se poursuivre sous différentes formes. La plupart du temps il s’agit de vastes paysages post-industriels, dans lesquels les protagonistes se promènent, nagent ou se livrent à des activités quotidiennes. Elles dépeignent en général des personnes solitaires, capturées à mi-distance, isolées et concentrées sur une action spécifique. Quant aux scènes d’intérieur, elles dévoilent des personnages ignorant notre regard, absorbés dans leurs tâches.
Șerban Savu développe une esthétique de ruine contemporaine, une fois l’utopie partie. Le peintre se réfère aussi volontiers dans son discours à Ionesco. Dans une seconde lecture, il critique la passivité et le manque de réaction de ses congénères, semblant toujours dans l’attente. Pour rendre palpable cette atmosphère, il élimine les détails et s’inspire de la lumière spécifique de son atelier.
Contexte sociologique et moment de l’histoire
La peinture de Șerban Savu décrit un contexte sociologique et un moment de l’histoire. C’est pourquoi elle pourrait passer pour descriptive. Pourtant si la manière évoque le réalisme socialiste par ses personnages simplifiés et “cubo-naïfs”, on ne peut se départir d’un puissant sentiment d’irréalité devant les scènes nimbées d’une lumière iridescente que le peintre donne à chacune de ses toiles.
Ses œuvres évoquent à la fois les toiles des Impressionnistes, mais font également écho aux œuvres de Jean-François Millet, Pieter Bruegel ou Edward Hopper, dans cette faculté à capturer un moment singulier, à suspendre le temps pour un court instant.

