Le sens de mon engagement politique auprès de la France insoumise

Ce n’est pas pour bâtir un monde idéal que l’on participe au combat politique, mais pour résister au désastre et à la honte du monde d’avant.

Le monde idéal dont on rêve et pour lequel on se bat n’advient jamais. Le monde d’après n’est jamais celui auquel on aspire. Le monde d’après sera fait de bric-et-de broc, comme les précédents, sur les ruines fumantes (et probablement ensanglantées) du monde d’avant.

Mais alors, pour quoi se battre ? Pourquoi mon engagement résolu auprès de la France insoumise ? Eh bien parce que si le combat politique peut paraître désespérant, il n’est jamais désespéré. Les victoires qu’on y obtient sont certes éphémères, mais décisives au regard de l’Histoire. Les mesures du Front populaire, du Conseil national de la Résistance ou encore les acquis du mouvement de Mai 68 (qui n’exerça jamais de pouvoir politique officiel) furent obtenus en de très courtes périodes.

Un an maximum pour mettre en place des mesures-phares

Si la France insoumise parvenait au pouvoir, je sais qu’elle n’aurait que quelques mois, un an grand maximum, pour imposer quelques mesures-phares de son programme, l’Avenir en commun. Toute tergiversation, toute remise au lendemain seraient fatales (le plan A pour changer l’Union européenne de l’intérieur, par exemple : ce n’est rien d’être la 5e puissance économique mondiale si c’est le camp d’en face qui gère votre monnaie, l’euro).

Passé quelques mois, un an maximum, tout pouvoir commence à se corrompre. Des représentants confortablement rémunérés finissant par préférer leur position confortable à des convictions qui le deviennent beaucoup moins, la contre-attaque inévitable des forces réactionnaires…

Regardez ce qu’il est advenu à Siryza en Grèce. Ce n’est pas tant la trahison de Tsipras (après avoir voulu lui aussi changer l’Europe allemande de l’intérieur) qui a causé la chute de ce mouvement, mais l’attitude de ses députés qui ont suivi en grande majorité leur leader dans son renoncement. N’est pas Zoé Konstantopoúlou qui veut.

La quête inestimable d’une liberté

Ce jeu à si court terme vaut-il la chandelle d’un engagement politique sans fin ? Au moment où j’écris ces lignes, je tombe sur un article du journaliste américain Chris Hedges, traduit et publié ce matin en français par le site Les Crises.  Je vous conseille instamment de le lire tant ses conclusions vont dans le même sens que celles développées dans ce billet. Le but du combat politique n’est pas la quête du bonheur, écrit Chris Hedges, mais la quête de la liberté et de l’honneur :

« La plupart de ceux qui résistent – Sitting Bull, Emma Goldman, Malcolm X et Martin Luther king Jr – ont été battus, du moins selon le froid calcul des puissants. La qualité ultime de la résistance, mais pas la moindre, comme l’écrit Cone, est qu’elle « renverse le système de valeurs du monde ». De la défaite s’élève l’espérance. Ceux qui résistent se tiennent auprès des crucifiés, peu importe le coût à payer. C’est leur grandeur et leur pouvoir. »

L’engagement politique est un combat sans cesse recommencé. Il est une fuite éperdue dans la révolution permanente, expliquait Henri Laborit dans son Éloge de la fuite.

Chris Hedges :

« La résistance n’est pas seulement lutter contre les forces obscures. C’est devenir un être humain complet et entier. C’est surmonter la séparation. C’est la capacité d’aimer. C’est honorer le sacré. C’est la dignité. C’est le sacrifice. C’est le courage. C’est être libre. La résistance est le pinacle de l’existence humaine. »

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.