Selon Charles Sannat, vous allez adorer le film « La Crise II »

Combien de conversations entre amis, au cours de repas copieux et joyeusement arrosés, sans que celles-ci ne finissent par tourner autour de la Grande Crise, de ses effets désastreux sur nos vies présentes, des menaces qu’elles font peser sur notre avenir ? Celle-là ne dérogea pas à la règle…

Entre deux bouchées et quelques verres, nous n’avons pas manqué d’évoquer la dilution de nos institutions politiques, l’insupportable régression de nos systèmes de santé, éducatif, le chômage galopant, toute cette génération de jeunes sacrifiés, les discriminations faites aux minorités et aux étrangers…

La conclusion de l’un des convives fut un peu détonante : « Ça va tout de même mieux qu’en 2008 ! »

Son argument, courant, portait sur l’apparent éclat retrouvé de notre système financier, ses résultats euphoriques, ses bonus surréalistes… Le vin était diablement bon et ne permettait plus l’idée d’une réplique claire. La conversation en resta là.

Un B-A-BA essentiel pour comprendre la crise financière

Le lendemain, je suis tombé sur le billet d’un certain Charles Sannat. J’ai regretté de ne pas l’avoir eu sur moi la veille au soir. Un B-A-BA sur la crise financière si mâché et si clairement détaillé qu’il doit bien être compatible avec la bonne chère et les petits verres de trop. Son titre : « Faudra-t-il encore sauver les banques ? »

Charles Sannat commence par livrer aux ignares que nous sommes quelques chiffres-clés comme bases de comparaison (chiffres donnés à la louche en milliards d’euros) :

  • PIB France : 2000
  • budget de l’État (somme des impôts et des taxes) : 300
  • déficit budgétaire : 180
  • dette publique (cad la somme de tous les déficits annuels accumulés) : 1600

Puis le malin compare les résultats figurant au bilan de nos chères banques. Voici un petit total pour l’ensemble des principales banques françaises (chiffres 2009 en milliards d’euros) :

  • taille des engagements : 8547 (4,3 fois notre PIB ! )
  • fonds propres (fonds dont disposent les banques pour faire face seules à leurs engagements) : 274
  • bénéfice net : 7,7
  • capitalisation boursière : 141,7

« Trop grosses pour être sauvées »

Pas la peine d’être fortiches pour comprendre le degré de fragilité de nos pauvres banques. Imaginez un nouveau crack et que l’État français doivent à nouveau mettre la main à la poche pour sauver celles qui sont engagées à hauteur de 4,3 fois notre PIB, 28 fois notre budget d’État, et dont les fonds propres et les bénéfices sont ridiculement insuffisants.

Charles Sannat le note en rigolant : nos banques ne sont plus « too big to fail » (trop grosses pour faire faillite), mais carrément « too big to save » (trop grosses pour être sauvées).

Bon , bon, diront ceux qui n’auront pas encore totalement évacué les vapeurs d’alcool de la soirée, pour l’instant y a pas de lézard, ni menaces sérieuses.

De terribles épées de Damoclès au-dessus de nos têtes

Ben justement si, répond l’ami Sannat. Nos braves banques ont au-dessus de la tête de terribles épées de Damoclès dont elles rongent elles-mêmes les fils :

  • dettes souveraines : 480 milliards dans les pays dits à risques (Irlande, Grèce, Portugal, Espagne) + 476 milliards pour la seule Italie de Berlusconi
  • produits dérivés : 600.000 milliards ( ! ! ! )
  • crise immobilière mondiale (toujours d’actualité aux USA, en Grande-Bretagne, en Espagne…)
  • endettement de plus en plus insupportable de certains pays avec risques graves de défaut de paiement (USA en tête)
  • bulles spéculatives des pays émergents (Chine en premier lieu, avec une inflation de moins en moins maîtrisée).

Voilà, vous avez suffisamment de données en mains pour comprendre les incroyables périls qui nous menacent aujourd’hui. Certains inquiétants craquements se font déjà entendre.

Et ce n’est pas les moult « plans de sauvetages » proposés, tant par le FMI que par les instances européennes, qui peuvent en rien rassurer. Ceux-là ne font que rajouter dramatiquement aux engagements astronomiques des circuits financiers.

« Vous avez aimé le film “La Crise”, vous allez adorer “La Crise II”. Encore mieux, encore pire », ricane Charles Sannat.

Ça va, chers lecteurs ? Vous avez saisi la situation, maintenant ? Bon allez, goutez-moi ce petit rubis. Toujours un que cette engeance n’aura pas. Santé !

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