
Pour espérer remplacer un système en décomposition, toute société doit non seulement se reconnaître des leaders, mais aussi reconstituer son élite dirigeante.
Le mot élite a mauvaise presse. Cela vient du fait qu’on l’associe trop étroitement à la vieille élite du système qui se décompose. L’élite dirigeante d’un pays se compose de ceux qui font autorité dans leurs domaines de compétence et sont le plus à même de faire fonctionner les institutions politiques, économiques, sociales, intellectuelles de ce pays. Il est clair que ce rôle ne peut plus être assuré par la vieille élite décadente et corrompue qui a conduit la France dans le mur.
La nouvelle élite devra s’affranchir totalement de tout ce (et ceux) qui constituai(en)t le système décadent d’avant. Des personnes rescapées de ce système, mais encore infectées pour en être trop tardivement sorties, atteintes qui plus est par la limite d’âge, ne peuvent espérer jouer un rôle actif dans la reconstruction de leur pays : pas plus Jean-Luc Mélenchon (67 ans) en France que Jeremy Corbyn (70) en Grande-Bretagne ou Bernie Sanders (77) aux USA.
Qu’ils me pardonnent, mais des intellectuels aussi brillants qu’Emmanuel Todd (67 ans) ou Jacques Sapir (65) ne peuvent plus aspirer qu’à un rôle, essentiel certes, de conseillers avisés, mais plus être aux manettes. Pensez, ils ont le même âge que moi ? ! Franchie la limite d’âge, une élite même brillante est une élite à la retraite.
Une révolte populaire ne peut devenir une révolution que si elle a su engendrer sa nouvelle élite
L’âge ne fait pas tout bien sûr. Il ne suffit pas d’être jeune et un tant soit peu connu pour prétendre figurer dans l’élite nouvelle, il faut d’abord être totalement décontaminé des usages et des pratiques du vieux monde d’avant (non, je ne citerai aucun nom des personnalités « contaminées » auxquelles je pense).
Mais alors qui ? La reconstitution d’une élite est chose délicate, mais impérative. Une révolte populaire ne peut devenir une révolution que si elle a su engendrer sa nouvelle élite. Mais la nature (même humaine) fait parfois bien les choses. Des premiers noms apparaissent qui me viennent à l’esprit (liste* non exhaustive ni définitive, par ordre alphabétique et de droite à gauche sur la photo ci-dessus) :
François Boulo
Juan Branco
David Cayla
François Cocq
Coralie Delaume
Manon Le Bretton
Priscillia Ludosky
Corinne Morel-Darleux…
J’en oublie bien sûr beaucoup – à dessein, car ce n’est pas à moi de désigner l’élite nouvelle. D’autres mûrissent encore dans l’ombre. Mais une chose est sûre, une nouvelle génération est en train de naître qui laisse entrevoir la sortie d’un tunnel aussi long que désespérant.
* Ne figure dans ma liste aucun des leaders « naturels » du mouvement des Gilets jaunes – Éric Drouet, Jérôme Rodrigues, Maxime Nicolle ; c’est que les qualités des leaders (déclencheurs, incitateurs, meneurs) ne sont pas forcément les mêmes que celles exigées de l’élite d’un pays (animateurs, initiateurs, organisateurs, souvent dans un domaine de compétence bien spécifique). Les deux sont cependant aussi complémentaires qu’indispensables.