Un « printemps arabe » au Québec ?

La manifestation du 100e jour

Mais que se passe-t-il au Québec ? Cette province peinarde qu’on croyait assoupie, au chaud d’un Canada à l’ombre du grand frère US. Qu’est-qui qui leur prend, au sortir des torpeurs du grand hiver, à semer leur zizanie dans les rues comme ça ? 100e jour d’indignation à Montréal.

Évidemment, tout est parti d’un prétexte presque banal — la hausse jugée excessive des droits d’inscriptions universitaires — pour dériver vers un mouvement dont on sent bien qu’il se fonde sur des raisons volcaniques autrement plus enfouies.

Aux jeunes des premières manifs, sont venus se greffer de beaucoup moins jeunes protestataires. Et les rassemblements se multiplient. Plus de 200 en quinze semaines. Tantôt festifs, tantôt houleux. Mais bien vivants.

La << loi matraque >>

Évidemment encore, comme toujours dans ce cas-là, le régime en place ne réagit pas en ouvrant sérieusement des négociations. En en appelant à de nouvelles élections pour tenter de dénouer l’écheveau des rancœurs et des frustrations en fusion.

Mais par une loi spéciale, cette « maudite loi » 78 qui prétend faire payer très cher aux manifestants le droit de manifester. Bref, qui met avec entrain le feu aux poudres. En renforçant la zizanie en cours.

La loi devient l’objet de focalisation de l’exaspération populaire, l’exutoire commode d’une pulsion de révolte. Et d’une révolte étudiante, on débouche sur une fronde sociale avec des désirs fous de transgressions civiques.

On manifeste désormais… pour le droit de manifester. Comme ce mardi 22 mai ou plusieurs dizaines de milliers de manifestants, toutes générations confondues, vinrent dire leur fait à la << loi matraque >>.

L’indignation comme phénomène épidémique

Les gloseurs impénitents dont les commentaires visent surtout à justifier le propre immobilisme craintif, auront beau jeu de désigner les faibles perspectives politiques d’un tel soulèvement spontané. Et de pointer avec un soulagement mal dissimulé les futurs éventuels « échecs » du mouvement.

Aucun Syriza local pour fédérer le mécontentement et lui donner une expression politique. Un syndicat étudiant, la Classe, qui n’a pas vocation à cela. Et trop tôt aussi pour dire si le manifestants obtiendront satisfaction sur leurs revendications concrètes immédiates.

Mais on ne peut être qu’interpelé par cette épidémie d’indignation qui se répand aux quatre coins de la planète, y compris dans les endroits qu’on croyait encore protégés.

Quant à anticiper la fin de l’histoire, n’est-ce point plutôt la qualité des débuts qui au bout du compte importe le plus ? Pour commencer.

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