
Un groupe de travail “Enseignement scolaire”, mis en place le 14 avril par le bureau de la commission, culture, éducation et communication du Sénat, a rendu jeudi 23 avril son rapport sur la reprise scolaire annoncée pour le 11 mai par le gouvernement.
« Ce groupe de travail a notamment auditionné des experts médicaux et scientifiques, des représentants des collectivités territoriales, des recteurs, des représentants de chefs d’établissement, d’enseignants des premier et second degrés, des représentants des parents d’élèves ou encore des directeurs d’école ayant participé à l’accueil des enfants des personnels indispensables à la gestion de la crise. »
Extraits de la partie constat d’un rapport cinglant :
I) La décision de rouvrir les établissements scolaires et les écoles à partir du 11 mai : une annonce surprise, aux modalités de mise en œuvre mal définies, élaborées sans concertation
a) Une impression d’impréparation et d’improvisation plus de 10 jours après l’annonce de cette réouverture
De très nombreuses personnes auditionnées ont fait part de leur surprise à l’annonce d’une réouverture des écoles à partir du 11 mai, qu’il s’agisse de personnes issues du monde médical ou de l’enseignement.
Le retour des élèves en classe n’était ainsi pas évoqué lors des concertations au ministère de la santé. Il en est de même pour les discussions avec les syndicats dans les jours précédant le 13 avril : selon les informations transmises au groupe de travail, les hypothèses de reprise portaient plutôt sur juin voire septembre.
b) des scénarii de travail ne reposant pas sur un avis scientifique
Alors que depuis le début du confinement, le gouvernement indique fonder ses décisions sur des avis scientifiques, les hypothèses de travail présentées mardi dépendent de préconisations sanitaires en cours de définition et non connues à ce jour.
c) Une absence de réelle concertation notamment avec les collectivités locales, partenaires essentiels du scolaire et du périscolaire
Le groupe de travail a été très surpris d’apprendre que ni l’Association des Maires de France, ni l’Assemblée des Départements de France ne semblaient avoir officiellement été contactées et associées à cette démarche de concertation.
d) De nombreuses questions demeurent auxquelles ne répondent pas les dernières déclarations du ministre de l’éducation nationale
À moins de trois semaines de la date prévue de la réouverture des classes, de très nombreuses questions pratiques demeurent [et qui n’ont pas été traitées, ndlr]. En voici quelques-unes:
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- Quel doit être l’objectif de ces cinq à huit semaines de cours restantes ?
Un consensus se dégage de l’ensemble des auditions. Il n’est pas possible au 11 mai de reprendre les cours comme si le confinement n’avait pas existé. - Le respect des gestes barrières et la question des points d’eau.
La question des sanitaires et de l’accès à des points d’eau est également souvent revenue. Selon un sondage réalisé mi-mars par l’observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement, 25 % des écoles n’ont pas de points d’eau en nombre suffisant. 75 % et 77 % des collèges et lycées estimaient également à cette période ne pas disposer de gel hydroalcoolique en quantité suffisante. - L’annonce de groupes de 15 élèves maximum par classe : une hypothèse de travail considérée comme trop élevée et faisant fi des différences de situation entre les établissements.
Ce plafond unique de 15 élèves par classe méconnait la diversité des établissements français. - Une absence de recensement des moyens humains et matériels disponibles.
À ce jour, il n’a été procédé à aucun recensement du nombre d’enseignants qui ne pourront pas reprendre les cours en présentiel parce qu’ils font partie des personnes vulnérables ou ont dans leur foyer une personne vulnérable. - La gestion des temps entourant les moments pédagogiques : grande absente des réflexions nationales actuelles.
Le groupe de travail a constaté qu’aucune réflexion n’avait commencé sur les temps entourant les moments pédagogiques. - La gestion des abords de l’école et des flux d’élèves à l’intérieur des établissements : éviter la création d’attroupements.
Cette thématique va conduire à des solutions personnalisées pour chaque établissement d’enseignement, nécessitant un temps de préparation. - La restauration, les internats et les transports scolaires : une réflexion indispensable pour un retour des élèves en classe.
Le groupe de travail constate qu’à chaque fois que ces thématiques ont été évoquées, aucune réponse n’a été apportée. - La question de l’accueil des petites et moyennes sections de maternelle.
Comme la quasi-unanimité des personnes auditionnées, le groupe de travail est sceptique sur la possibilité de faire revenir en présentiel les enfants des petites et moyennes sections de maternelle.
- Quel doit être l’objectif de ces cinq à huit semaines de cours restantes ?
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Le groupe de travail poursuit son rapport par onze préconisations pour « un retour progressif, concerté et sécurisé » qui aboutissent toutes au même constat : pas de reprise sérieuse et sécurisée des cours envisageable avant la rentrée de septembre 2020.
Mais qui est encore un peu sérieux dans ce gouvernement ? Qui va être un peu sérieux et responsable parmi ces parents qui vont décider d’envoyer ou non leurs enfants en école, ces enseignants ou ces autorités locales qui vont accepter de les accueillir dans de telles inconséquentes conditions ?
=> Lire le rapport du groupe de travail “enseignement scolaire”, mis en place à l’initiative du bureau de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat.