Quelles catastrophes faudra-t-il pour que nous réagissions enfin ?

S’enchaînent les catastrophes climatiques, structurelles, économiques, politiques, sociales, humaines et… et rien, aucune réaction des collectivités humaines, ou presque.

Effondrement du pont Morandi à Gênes (Italie), incendies crépusculaires en Californie, en Grèce, en Suède, typhon Jebi au Japon (le plus violent depuis 25 ans), canicules meurtrières (54 morts au Québec en juillet), sans compter les calamités politiques que sont la plupart de nos dirigeants élus (Trump, Macron, May…)…

Et rien ! Nous déplorons nos morts avec une affliction passive, limite indifférente, nous consultons juste les compagnies d’assurances pour tenter de limiter nos dégâts financiers, prononçons quelque vœux vite oubliés de reprise en main sans conviction et regardons le bout de nos godasses d’un œil comateux, la tête un peu plus enfoncée dans les épaules pour affronter les prochaines catastrophes. Nous vaquons à nos occupations comme si de rien n’était.

Un cerveau pour le court terme seulement

Le site Reporterre s’est interrogé sur les raisons de notre manque de mobilisation face au « drame écologique ». Les réponses fournies par les intellectuels consultés tournent toutes autour de l’incompatibilité entre le libéralisme court-termiste d’une élite aveugle et les soins de longue durée que nécessiterait l’écologie.

Quant à l’apathie des masses devant les catastrophes qui les menacent directement, la faute en reviendrait au fonctionnement du cerveau humain, réticent à toute modification de ses habitudes, explique Sylvie Granon, chercheuse en neurosciences comportementales à l’Institut de neurosciences Paris-Saclay.

Derrière ces théories un brin sophistiquées – et stériles – la conclusion est que notre cerveau humain fonctionne obstinément à court-terme et que ni les élites en fonction, ni les intellectuels, ni les masses populaires ne sont véritablement en mesure de répondre aux défis à long terme, même quand l’existence de l’espèce en dépend.

3,5% d’authentiques résistants

Pas d’espoir, alors ? Mais si, s’écrient Erica Chenoweth et Maria J. Stephan dans leur ouvrage « Why Civil Resistance Works »» (Pourquoi la désobéissance civile fonctionne), il suffit de mobiliser 3,5% d’une population pour qu’une résistance non violente ait gain de cause et renverse un gouvernement honni [compte-rendu sur le site La Relève]. 3,5%, c’est un constat de terrain, expliquent les auteures, tout en rappelant que 3,5% de la population de leur pays, les États-Unis, c’est quand même presque 11 millions de « résistants ».

Bah, nos deux spécialistes, l’une chercheuse en violence politique et résistance citoyenne, l’autre experte des mouvements de désobéissance civile, seraient presque un brin pessimistes : en 1939-40, le pourcentage de résistants étaient bien inférieur à 3,5 % de la population française.

L’utopie gentillette d’une révolution non violente

Mais deux remarques toutefois :

  1. S’appuyer exclusivement sur la non violence comme le font nos deux auteures relève de l’utopie gentillette de pure convenance : vous pouvez être sûr que même en cas de résistance non violente, le camp d’en face n’hésitera pas, lui, à cogner dans le tas pour essayer de sauver les derniers lambeaux de son pouvoir menacé.
  2. Il ne suffira pas non plus de changer de gouvernement pour échapper à l’effondrement. Il faudra aussi se désintoxiquer des réalités imaginaires (le mythe de l’argent-roi, la mirage de la croissance, la valeur-travail mon cul, la religion de la technologie toute puissante…) brodées par le système capitaliste pour tenir ses ouailles en état de dépendance… Et là, ce n’est pas gagné !

L’effet d’entraînement d’un fort mouvement de résistance sur les masses apathiques ne peut être nié (ces dernières basculent toujours du côté du plus fort). Mais dans la plupart des cas constatés au fil de l’Histoire, il fallut aussi, hélas, des tragédies façon Seconde Guerre mondiale pour que le pourcentage de résistants passent miraculeusement de 0,35% à 99,99% de la population, comme ce fut paraît-il le cas lors de la Libération de la France en 1945.

Mais bon, pas d’autre solution que de rester optimiste :

« Ne doutez jamais qu’un petit groupe d’individus conscients et engagés puisse changer le monde. C’est d’ailleurs toujours comme cela que ça s’est passé » (Margaret Mead).

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