SeaFrance : quand la CFDT mène la lutte anti-syndicale

À quelques jours d’un jugement capital du tribunal de commerce de Lille sur le sort de SeaFrance et de ses 880 salariés, la confédération nationale de la CFDT vient de publiquement dénoncer… les << erreurs graves >> de sa branche Maritime nord !

Nonobstant les raisons qui ont motivé un tel désaveu, on peut légitimement s’interroger sur le moment et la manière choisis pour l’exprimer.

  • A-t-il vraiment fallu tout ce temps au staff de François Chérèque pour se rendre compte du problème posé par ses représentants de la branche SeaFrance ?
  • Était-il vraiment nécessaire de se répandre dans les médias plutôt que de s’en ouvrir plus discrètement aux intéressés ?
  • À ce point avancé de l’affaire, était-il vraiment impossible d’attendre le verdict du tribunal pour vider un abcès en apparence interne ?

Curée médiatique

Il n’en fallait pas plus à la presse microcosmique pour lancer la curée :

<< La faillite de SeaFrance : un sabotage syndical >> (Le Figaro)

<< J’ai des enfants, une famille, je ne veux pas retrouver ma maison en feu >> (Europe 1, citant un salarié non-syndiqué, s’exprimant toute voix blanche maquillée)

Ajoutez à ce déferlement médiatique un vieux rapport de la Cour des comptes datant de 2009, exhumé opportunément pour stigmatiser les pratiques monopolisantes de la CFDT Maritime nord en matière de recrutement.

Considérez la création in extremis d’un collectif de non-syndiqués de SeaFrance reprenant à son compte… la suggestion du syndicat CFDT cru Chérèque (la piste d’une reprise par une nébuleuse Louis Dreyfus Armateurs/DFDS).

Et vous aurez une idée assez nauséeuse de la confusion régnante (après la volteface sarkozyenne contredisant ouvertement ses propres ministres en préconisant ex abrupto la création d’une SCOP).

<< Cette racaille >>

Nous voilà tout juste arrivés à la fin de la première semaine d’un année 2012 qui s’annonce bien chaotique et épuisante. Excusez ma flemme de présentement démêler le vrai du faux dans cet assez écœurant salmigondis de dernière minute où l’avenir de 880 salariés est tout bonnement hypothéqué.

Mais tout de même, difficile d’oublier les grands écarts d’un Chérèque passant sans transition en une seule journée (le 13 décembre 2011) d’une manif contre la rigueur… à un colloque organisé par le Medef sur le thème « compétitivité : agir ensemble maintenant ».

Mais encore, ce constat un peu décoiffant d’une ex-secrétaire générale de la CFDT, Nicole Notat, acceptant d’être la médiatrice d’une SNCF en train de pulvériser ce qui reste de son service public.

Mais enfin, ce souvenir troublant du secrétaire général d’un autre syndicat, Bernard Thibauld (CGT), sapant le combat de son représentant local dans une autre lutte, celle des « Conti », au point de se voir taxer en retour de << racaille >> par celui-ci (Xavier Mathieu).

<< Les Thibault et compagnie, c’est juste bon qu’à frayer avec le gouvernement, à calmer les bases. Ils servent juste qu’à ça, toute cette racaille ! >>

Si c’est un syndiqué de la base qui le dit…

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