Poutine, la question démocratique et une petite lueur d’espoir

Hier, dans mon confinement, je suis tombé sur un discours de Poutine s’adressant à la “nation russe”. Je n’en croyais pas mes oreilles : un véritable chef d’État !

Discours concis, ton assuré (derrière une traduction en directe un peu hésitante), prise en compte claire d’une situation de crise exceptionnelle, décisions pragmatiques, promesses concrètes et sans détour – arrêts des activités non essentielles pendant un mois « avec le maintien des salaires » – remerciements à tout le monde, même aux Russes d’en bas…

Alors bien sûr, j’entends déjà les commentaires : un autocrate ! un dictateur ! et la démocratie ? et la liberté d’expression ?…

La démocratie de la médiocrité majoritaire et du droit au blasphème

Mais de quelle démocratie et de quelle liberté d’expression parlons-nous ? De la démocratie qui nous donne des Trump, des Bolsonaro et des Macron (après des Chirac, des Sarkozy,et des Hollande) ? De la démocratie réduite à la médiocrité majoritaire (car ces sinistres “leaders” ne sont pas arrivés tout seul au pouvoir) ? De la liberté d’expression réduite à une triste caricature : le droit au blasphème ?

Un seul chef d’État français de la 5ème République avait une stature équivalente à celle de Poutine : De Gaulle. Même nous, qui étions ses farouches opposants, écoutions chacune de ses interventions avec respect. De Gaulle représentait aussi un monde ancien avec un carcan de conventions étriquées que nous ne supportions plus, avec un entourage chelou (Pompidou le banquier, Pasqua le représentant en anisette un brin truand sur les bords…). Notre révolte  de Mai 68 l’a emporté : De Gaulle est parti le 28 avril 1969, avec panache, reconnaissons-le.

Au début, nous n’avons pas regretté notre action – les années 70 ont été un bonheur ! Mais ensuite quel naufrage, quelle succession de chefaillons sans foi ni loi (même Mitterrand n’en sort pas indemne), quelle longue descente aux enfers pour cette démocratie du droit au blasphème, de l’identité nationale préservée par des centres de rétention, et de la laïcité mon cul.

En route vers un monde post-confinement (grâce au coronavirus !)

Sans blague, dans mon confinement, j’en arrive presque à trouver que cette pandémie de coronavirus a des effets providentiels. Elle va réussir ce que même mes si chers Gilets jaunes n’ont pas réussi en 66 actes : foutre le sale monde glauque en l’air. On le savait qu’il était agonisant depuis des années, on le savait qu’il ne vivait plus que d’expédients financiers tordus et de laborieux placebos médiatiques. Mais là, je vous parie qu’il ne va pas s’en remettre. La crise de 2008, de la gnognotte à côté de celle-ci.

Même le confinement a du bon. Les oiseaux de mauvais augures médiatiques croient bon de nous prédire une vague de violences conjugales et de divorces. Mais ce n’est pas ce que je constate autour de moi. Pas facile, la réclusion à deux et plus en locaux clos, d’accord. Mais regardez, les gens peu à peu commencent à s’adapter à la situation, se font des Skype pour prendre des nouvelles, s’adaptent sans plaintes aux contraintes et aux restrictions d’une situation de guerre (ou presque). Dehors, presque plus personne, mais des gens qui se saluent quand ils se croisent, des mines qui ne font même plus la gueule – enfin, en milieu urbain, je ne sais pas, mais pariez que si le confinement dure, les citadins vont eux aussi commencer à se parler. Comme en Mai 68 !

Et surtout, surtout, le confinement détache les gens du tempo de vie apoplectique auquel le système les condamnait. Les gens s’habituent à un nouveau rythme, sans horaires, sans travail (sans travail !!!) Oui, cette pandémie est une aubaine à saisir, et qu’il va bien falloir saisir vu que le système va caler et qu’il ne sera plus en mesure de fournir ne serait-ce que le minimum vital à ses citoyens, pardon, “consommateurs”. La civilisation de la décroissance tombée du ciel (et du Covid-19).

Oh bien sûr, ça va secouer, va y avoir du grabuge et des dégâts – vous connaissez des révolutions qui n’en produisent pas ? Mais tout va petit à petit se mettre en place, se relocaliser (regardez, avec le confinement, c’est déjà commencé). Courage, les jeunes, n’ayez pas peur. Saisissez l’aubaine. Rappelez-vous que c’est toujours après une catastrophe systémique que se produisent les plus grands progrès humains : les congés payés et la réduction du temps de travail après la crise des années 30, la Sécu et les services publics pour tous après la Seconde Guerre mondiale…

Allez, bonne journée à vous, portez-vous bien. Je vous embrasse.

A propos de Pierrick Tillet 3377 Articles
Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.