
Nous pataugeons dans un monde fini où le puritanisme étriqué règne en maître. Comment concevoir un monde d’après sans une nouvelle libération sexuelle ?
C’est peu dire que notre époque troublée est à nouveau coincée du cul. Remarquez, ce n’est pas une première. Il suffit de parcourir les mésaventures du clitoris dans l’histoire de l’humanité pour comprendre toute la difficulté des rapports que nous avons de tout temps entretenu avec notre corps et ses envies.
Les joyeux drilles de Et tout le monde s’en fout se sont chargés, à leur manière abrupte, d’en dresser un parcours beaucoup plus sérieux et moins extravagant qu’il n’y paraît :
Songez que l’être humain n’a rien trouvé de mieux, au fil de son histoire, que d’exécrer tout ce qui sort de ce corps périssable : l’urine, les excréments, la sueur, les odeurs… (Les animaux, eux, sont moins regardant, pour leur plus grand bonheur.)
C’est ballot, parce qu’à y regarder de plus près, certaines de ces excrétions humaines honnies se révèlent d’une redoutable utilité :
« L’urine, un engrais épatant » (Reporterre, article paru le 7 octobre 2017)
Pire, l’être humain ne trouve rien de plus débile que de souhaiter à ses pires ennemis ce qui peut leur arriver de mieux :
« Va te faire foutre, va te faire enculer, les baisés comptez-vous… »
La période jubilatoire (mais trop brève) des années 70
J’ai connu la période jubilatoire (mais trop brève !) de la libération sexuelle dans les années 70. Bien sûr qu’elle donna lieu à des excès. Mais n’est-ce pas le propre des périodes de libération que de sécréter des excès ?
À l’opposé, rien ne me paraît plus douteux que ces révolutionnaires exsangues au moins aussi moralistes et castrateurs que les missionnaires des anciennes colonies.
Tétons dévoilés interdits sous les t shirts ou sur les réseaux sociaux, langage pudibond à l’excès, plaisir sexuel relégué dans les circuits interlopes…
Pardon, mais c’est trop bon…
… mais jamais enterrés complètement, heureusement ! J’ai trouvé un documentaire assez jouissif sur le plaisir féminin diffusé par Arte en 2004. On n’y échappe évidemment pas aux interventions débandantes des sexologues et autres spécialistes en tout genre. Mais les témoignages des filles interrogées (de la trentaine à plus de soixante berges) sont touchantes à souhait.
C’est marrant, le plaisir sexuel est souvent considéré sous le seul angle féminin. Je suis également tombé sur un autre documentaire d’Arte consacré au plaisir masculin. Ce dernier n’y est d’abord entrevu que sous l’angle rebattu de l’éjaculation, de la performance sportive et de la démonstration de puissance, mais finit par explorer des domaines un peu plus subtils et trop méconnus de la jouissance des hommes.
Car qui s’y aventure finit vite par découvrir que le plaisir masculin peut être aussi riche et varié que son homologue de l’autre sexe, que le mâle peut aussi prendre un intense plaisir à s’abandonner, à se laisser prendre plutôt qu’à dominer, sans se se laisser confiner à la seule fameuse éjaculation, certes agréable, mais souvent fort brève.
Bref, y a encore du boulot question libération des mœurs et avènement épanoui du monde d’après. Mais on y arrivera, n’est-ce pas ?