Le programme du Yéti : 2. La moralisation du système financier

Ils n’ont plus que ça à la bouche : « moraliser » le système financier. Les mots après les maux. Qu’ont-ils réellement fait depuis que cette crise a éclaté, en janvier 2008 ? Rien. Des mots. Quelques vagues déclarations d’intention médiatiques, faussement indignées, pour faire bonne mesure et illusion, lors des moments les plus chauds. Mais sinon, rien. Il est grand temps de nettoyer ces écuries d’Augias.

__L’argent__ D’abord rendre à l’argent sa fonction première : un moyen d’échange des biens et des services disponibles dans un espace donné. De ceci découle un principe tout simple : le volume d’argent disponible dans un pays doit correspondre peu ou prou au volume des biens et des services proposés par le système économique. Avec en fonction de l’enrichissement du pays, une part dite de précaution : l’épargne. Un organisme d’Etat, la Banque de France, devrait être chargé, comme c’était sa fonction à l’origine, de réguler cette masse monétaire dans l’espace défini et sa répartition entre les différents postes : investissement, consommation, épargne… Ses liens avec la Banque Centrale Européenne (BCE) seront précisés dans un prochain volet consacré à l’Europe. __Les banques__ Le système bancaire par établissements privés peut être maintenu, mais moyennant des règles beaucoup plus strictes et « morales » de fonctionnement. Remise à plat de la nébuleuse des frais bancaires. Et notamment celle des tristement fameuses pénalités, outrageusement utilisées pour ponctionner un peu plus les plus démunis. Ces pénalités seront remplacées par un système d’intérêts à payer selon des règles établies par la loi, basés sur les taux directeurs de la Banque de France. Bien loin des taux d’usure aujourd’hui pratiqués (cas des découverts bancaires autorisés ou non, par exemple). L’utilisation par les banques de leurs fonds, c’est-à-dire de l’argent de leurs clients, sera strictement encadrée. Tout placement devra justifier de son caractère productif et de son utilité. L’utilisation purement spéculative, c’est-à-dire, la création artificielle de l’argent par l’argent, sera interdite. Idem pour ce qui est de la filialisation dans les paradis fiscaux, moyen tout à fait sournois pour dissimuler des détournements éhontés de capitaux. Partant du principe que toute somme appartenant aux individus transite forcément par le système bancaire, une banque d’État sera créée pour ceux qui le désirent. Elle offre un service bancaire a minima, essentiellement de dépôts, avec des frais minimum de gestion. __Le crédit__ Véritable plaie du « monde d’avant », le crédit retrouvera sa seule raison d’être : une sorte de « paiement à tempérament » pour accompagner les particuliers et les ménages dans leur équipement en produits de première nécessité (équipement ménager, mobilier, automobile…) et en biens immobiliers. Le crédit n’est accordé aux entreprises que sur justification d’un projet économique. Pour favoriser la régulation et la bonne répartition des activités économiques, la banque d’État est habilitée à accorder des crédits à taux préférentiels (prêts à taux zéro, par exemple) aux particuliers et aux entreprises. Ces prêts se feront en fonction d’un plan de développement économique national établi par une autorité de rationalisation économique (ce point sera développé dans un prochain volet consacré à la rationalisation économique). Véritables pièges ne pouvant conduire qu’au surendettement et à l’impasse, les incitations multiples à la sur-consommation (crédit « revolving » et dérivés douteux) seront supprimés. __L’assurance__ Le monde de l’assurance devrait être lui aussi ramené sur les voies de la raison et de sa fonction d’origine : assurer les personnes et les biens, point. Cette assurance peut-être privée ou publique (la sécurité sociale, par exemple, qui sera bien évidemment restaurée dans ces pleines prérogatives). La banque d’État garantira une assurance basique aux particuliers qui le souhaitent. Comme pour leurs cousines bancaires, les fonds récoltés par les compagnies d’assurance ne pourront être utilisée que sur une justification d’utilité économique. Les investissements purement spéculatifs seront interdits. À ceux qui, encore contaminés par les tristes restes de la pensée néolibérale en déroute, hurleraient à l’utopie et à la destruction du système en cours, nous répliquerons que ce système s’auto-détruit tout seul comme un grand sous nos yeux ; que nous sommes encore seulement au début de son effondrement généralisé (et confirmé par des sommités comme l’économiste keynésien [James K. Galbraith|http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2609], le prix Nobel de l’économie [Paul Krugman|http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2606], ou encore le sociologue-anthropologue [Paul Jorion|http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2604]). La situation dramatique dans laquelle les dérives financières de ces trente dernières années désastreuses vont nous plonger, justifieront et faciliteront amplement ces mesures draconiennes de « moralisation ». Celles proposées ici, simples et élémentaires, peu couteuses, ne sont après tout guère différentes de celles prises par le Conseil National de la Résistance en 1945 et qui permirent les fameuses Trente Glorieuses.  »(À suivre : les services publics ressuscités) » ///html

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A propos de Pierrick Tillet 3377 Articles
Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.