
J’aime tous les signataires* du dernier communiqué des Gilets jaunes. Je suis admiratif de ce qu’ils font depuis maintenant plus de cinq mois, de leur courage, de leur volonté, de leur ténacité.
Mais je n’approuve pas leur dernier communiqué sur le slogan « suicidez-vous » adressés aux policiers par des Gilets jaunes le 20 avril à Paris. Je trouve ce communiqué inopportun, maladroit. Je m’explique.
- On ne se désolidarise pas de compagnons de lutte dans la tourmente. Ce sont eux, nos amis, qui étaient à la pointe du combat ce jour-là, place de la République à Paris. Avez-vous vu ce que cette « petite poignée d’individus » a subi avant de changer son slogan « ne vous suicidez pas, rejoignez-nous » en « suicidez-vous, suicidez-vous » ? Certes, ces propos étaient condamnables, mais compte-tenu du contexte, pas ceux qui les prononcèrent, surtout pas publiquement.
- On ne compatit pas au sort de l’adversaire pendant le combat, mais après qu’il se soit rendu. Croyez-vous que les hommes en noir vont nous faire des cadeaux ? Croyez-vous que si leur hiérarchie leur ordonne de tirer à balles réelles, ils ne le feront pas ? La chaleur qui les épuise n’est pas une plaie, mais une alliée opportune. Pendant les affrontements, on n’attend pas de l’adversaire qui vous tape dessus qu’il se rallie à votre cause, on le force à se rendre.
- Croyez-vous encore, après plus de cinq mois de lutte acharnée mais vaine, que le pouvoir va « mettre en actions nos revendications » ? Réponse dès jeudi soir quand le président Macron ne tirera de son « Grand débat », en dehors de quelques peccadilles consenties pour noyer le poisson, qu’une incitation à travailler plus ! En situation de guerre – car c’en est une – on ne demande pas au commandement adverse de compatir à notre sort, on le force à capituler et à céder la place.
- On ne ralliera pas l’opinion publique en se justifiant auprès d’elle avec les mêmes éléments de langage bien-pensants (la fameuse « langue de bois ») que les politiciens que nous combattons. L’opinion publique, qui partage pour l’essentiel nos revendications (comme nombre de policiers d’ailleurs), ne se ralliera à notre combat que si nous nous imposons dans le rapport de force qui nous oppose au pouvoir.
Ne voyez-vous pas que les signes de craquements se multiplient dans les rangs adverses : une répression d’autant plus violente qu’ils sentent la situation leur échapper, une équipe présidentielle paniquée au comportement de plus en plus erratique, des médias mainstream de plus en plus sonnés, eux qui vont jusqu’à ficher nos compagnons blessés dans les hôpitaux, qui vont juqu’à interdire d’informer nos compagnons journalistes comme Gaspard Glanz ?…
Il nous faut garder nos nerfs, garder notre cap, ne pas rejeter un seul de nos combattants, être implacables et intransigeants dans la progression de notre lutte, avancer. Nous ne gagnerons qu’en terrassant l’adversaire, pas en essayent de composer avec lui qui n’a nulle intention de le faire. Croyez-vous que c’est en accordant crédit aux accusations médiatiques spécieuses de l’adversaire que nous y parviendrons ?
Je termine en essayant de ne pas vous faire ce que je reproche à votre communiqué. Si j’émets des réserves à l’égard de la pertinence de celui-ci, je ne me désolidarise pas le moins du monde de vous qui l’avez signé et dont je vais continuer à partager le combat du mieux que je peux. Continuons ensemble.
Bien à vous,
Pierrick Tillet, dit le Yéti, Gilet jaune
Le signataires du communiqué : Priscillia Ludosky, Laetitia Dewalle, Julie Castin, Élodie Crisias (95), Faouzy Lellouche, Benoit Le Cam (Chartres), Maxime Nicolle, Philippe Pascot, Nathanaël RAMPHFT (Lille), Éric Drouet, Juan Branco, François Boulo, Hakim Lowe, Maxime Souque (Le vrai débat), Jérôme Rodrigues #Lafamille