Le Yéti change de chemise

Prendre un peu de recul sur ce qu’on fait. Ronronner, ça va le soir au coin du feu, mais pas sur un support médiatique lu par plein de gens bien. Trouver un nouvel axe d’expression pour se renouveler et ne pas lasser. Changer de peau ? Non, ce serait prétentieux. Disons, juste essayer de changer de chemise.

Voilà les quelques réflexions qui me taraudaient ces derniers temps. Parce que justement je trouvais que mes chroniques ronronnaient. Ni une, ni deux, plusieurs décisions :

1. L’arrêt de mes chroniques sur Rue89

J’ai averti la rédaction de Rue89 de ma décision d’arrêter la publication de mes billets sur l’espace qu’elle me dédiait depuis fin 2008. Je connaissais nos différences de vision des affaires de ce monde, mais à cause et en raison de ces différences d’appréciation, j’ai accepté à l’époque leur proposition. Je ne l’ai jamais regretté.

Bilan :

  • 657 chroniques quasiment toutes (à moins d’une dizaine d’exceptions) publiées en une ;
  • un programme de gouvernement complet en 11 volets paru dès mars 2009 (tournant autour de l’idée d’un revenu d’existence pour tous) ;
  • Et quelques mythes miteux dézingués (l’argent, la dette, le plein-emploi, la croissance…)

Pourquoi s’arrêter ? Voir chapeau de ce billet. Je me suis toujours dit qu’au moment de la rupture, on ne devait pas reprocher à l’autre de gâcher votre vie, mais le remercier de la part qu’il avait bien voulu vous accorder dans la sienne. Ciao, les ami(e)s de la Rue, et merci pour tout.

2. S’occuper du monde d’après

Mes chroniques visaient à montrer et décrire la chute inéluctable d’une civilisation, la nôtre. Celle du capitalisme triomphant, né industriel et échoué en un financiarisme stupide, avec sa croissance forcenée, sa compète sur le dos des autres, ses spéculations de sales gosses, son absence totale d’intérêt.

Seulement voilà, c’est fini. Le capitalisme néolibéral est scotché dans un état de mort clinique avancée, juste un peu prolongée. Ceux qui ne le savent pas encore ne le sauront jamais. Pas la peine de multiplier les exemples comme je le faisais pour les en persuader. Pas la peine de se complaire en vaines jérémiades et en indignations stériles. Fatigant.

Il est grand temps de s’occuper du monde d’après, de se pencher sur ces gens qui vivent déjà « ailleurs », qui tentent de trouver des solutions originales, même encore marginales, mais en se détournant de la bête moribonde. J’avais déjà fait un petit test sur le sujet avec ma petite série sur les gens d’à côté. Pas assez approfondi. Je vais m’y employer.

3. Explorer de nouveaux territoires

Mes petits billets seront toujours politiques, mais moins politiciens, plus locaux, plus personnels aussi. Je veux dire qu’ils s’occuperont de la vie de la cité et de mes voisins, beaucoup moins de celle des partis et des institutions. Les élections précédentes, les tristes « européennes » qui s’annoncent, montrent que la solution ne viendra pas de ce côté-là.

Pas grave, je ne sais pas, vous, mais en six décennies, je me suis rendu compte que je m’étais finalement plutôt marré, sans pourtant jamais connaître un régime de gouvernement correspondant de près ou de loin à mes aspirations. Comme quoi…

Bref, le temps est venu d’explorer de nouveaux territoires, à côté, décalés, plus que de décrire les soubresauts de l’ancien ad nauseam. Sur un autre support ? Peut-être bien, je ne sais pas encore. En attendant, il reste cet espace privé. Qui marche plutôt bien tout seul.

Et tiens, pour la peine je fais une tentative de réouverture des commentaires. Ce matin, il fait beau. Le soleil perce à travers les rideaux.

A propos de Pierrick Tillet 3377 Articles
Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.