Le retour aux frontières : en défense de François Ruffin

François Ruffin a suscité le tollé, à droite comme à gauche, en en appelant sur France Inter « au retour des frontières sur capitaux, marchandises et personnes ».

Le résultat de la suppression des frontières, c’est la globalisation, les délocalisations et la dérégulation sociale

Pourtant la question des frontières – et plus généralement du protectionnisme – est une question fondamentale qui se pose à nous depuis plusieurs années. En tout cas, c’est la question que j’abordais déjà dans mon programme de Yéti datant de 2009 et régulièrement réactualisé à l’approche de chaque   présidentielle (en vain). Dans la dernière mouture de ce programme, rédigée la veille de l’édition 2017, j’écrivais ceci :

« Restaurer la souveraineté nationale ne consiste pas à fermer ses frontières et à se replier sur soi-même, mais d’en fixer les conditions d’ouverture et de passage.

La suppression des frontières a été surtout une porte ouverte à la globalisation néolibérale la plus déchaînée, à la délocalisation sauvage des entreprises, aux dérégularisations sociales meurtrières. Il faut un sacré culot aux néolibéraux pour se poser en chantres de la liberté tous azimuts, quand ils ouvrent et dressent à la pelle des centres de rétention pour sans-papiers ou des murs renvoyant les migrants se faire noyer ailleurs.

Pas mieux pour la gauche bien-pensante qui est pour la relocalisaion des activités économiques et pour le retour aux protections sociales, mais se montre incapable de couper le cordon ombilical avec l’Union européenne, farouchement contre, ou d’envisager la souveraineté monétaire pour appliquer son programme.

Ne pas confondre le sort des migrants et le problème migratoire

Cette gauche naïve confond aussi le sort des migrants avec le problème migratoire. Que les migrants – tous les migrants – doivent être secourus en tant qu’être humains naufragés est une cause entendue par l’article 14 de la Déclaration universelle des droits de l’homme :

« Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l’asile en d’autres pays. »

Mais nier que les flux migratoires sauvages sont un problème fortement déstabilisant – non seulement pour ceux qui y sont contraints, mais aussi pour ceux qui vont devoir les affronter  – est absurde, surtout en période d’effondrement systémique total.

« Le problème migratoire mérite bien évidemment un traitement particulier. La France, terre d’accueil, se doit d’accueillir le maximum de réfugiés qui en manifestent le souhait. Mais comme tout phénomène subi, le flux migratoire mérite d’être régulé, à travers des accords internationaux, par exemple » (programme du Yéti 2009, revu 7 septembre 2016).

Laissons la conclusion de toute cette réflexion à Régis Debray, auteur d’un Éloge des frontières en 2010. Pour qu’on puisse ouvrir des frontières, disait-il, il faut qu’il y en ait.

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