Européennes : le très intéressant programme de Nouvelle Donne

Il y a un petit nouveau pour ces européennes : Nouvelle Donne (ND pour les intimes), le mouvement lancé par Pierre Larrouturou, socialiste défroqué (on le comprend !). Évidemment, accueil à peine poli, sans surprise, de nos médias confits du microcosme. Dommage, car le programme que ND vient de publier vaut le détour.

Le document compte 20 propositions, nettement affinées par rapport à un premier jet paru en décembre dernier. On ne va pas les détailler toutes ici. Les curieux pourront les découvrir en suivant le lien indiqué ci-dessus. Nous nous contenterons d’examiner les plus intéressantes, les plus originales. J’en ai retenu cinq.

Cinq mesures-phares

1. Une zone d’action constituée par << quelques pays partageant les mêmes objectifs >> : oh, mais dites donc, les gars, c’est à un retour à l’Europe pépère des 5 (ou 7 maxi) que vous nous proposez-là ? En marge de cette incongruité absolue que constitue ce conglomérat impossible à 28 et quelques poussières plus ou moins ukrainiennes à venir.

2. Un traité de l’Europe sociale : pas con du tout de proposer 5 critères de convergence sociale en réponse au 5 critères existants de convergence en matière financière (déficit inférieur à 3 %, etc.) :

  • taux de chômage inférieur à 5 % ;
  • taux de pauvreté inférieur à 5 % ;
  • taux de mal-logés inférieurs à 3% ;
  • taux d’illettrisme à l’âge de 10 ans inférieur à 3 % ;
  • aide publique au développement supérieure ou égale à 1 % du PIB.
  • 3. Une interdiction de la spéculation : interdire aux banques de spéculer avec l’argent de leurs déposants, interdire les produits financiers toxiques, interdire le trading haute-fréquence… Hého, les gens de ND, contactez fissa Paul Jorion, il va vous faire une pub d’enfer !

    4. La création d’un euro-franc en marge de l’euro, qui servirait entre autres — eh oui, tout arrive — à verser un revenu de base à tout citoyen. On touche ici à la « stratégie du choc » chère à Frédéric Lordon. Passer de la monnaie unique à une monnaie commune satellisée par autant de monnaies nationales (euro-lire, euro-peseta, euro-mark…)

    5. Pas de nouveau traité sans référendum : bon, là, ça tombe tellement sous le sens démocratique qu’on se demande comment on a pu s’en laisser déposséder. Et comment il faudrait dare-dare revenir sur un traité refusé par la vox populi en 2005, mais imposé en loucedé par des salopiots.

    Ce qu’il faudrait dire aux électeurs

    Car le talon d’Achille de ces mesures-phares est précisément qu’elles n’ont aucune chance dans le cadre européen actuel. Qu’elles ne peuvent voir le jour qu’à partir d’initiatives nationales tant tout est verrouillé, par les instances de Bruxelles, leurs traités félons, leur parlement-potiche.

    La question qui se pose dès lors est celle de savoir s’il faut envoyer malgré tout des représentants se dorer la pilule en pure perte à Strasbourg. Ou s’il faut attendre son heure dans le cadre national. Sur ce point, j’en resterai pour ma part à ma position initiale de boycott citoyen.

    Mais à chacun de se faire son idée. La démarche de ND vaut malgré tout qu’on s’y attarde. Ce qui manque encore, je crois, à ce tout jeune mouvement, c’est de dire enfin crûment aux électeurs ceci :

    << Voilà, nous nous présentons à ces élections sans aucun espoir de faire évoluer l’UE telle qu’elle est actuellement. Et telle que l’a refusée une majorité d’électeurs français lors du référendum de 2005. Si nous nous présentons devant vous aujourd’hui, c’est pour essayer de dynamiter l’UE du traité de Lisbonne et promouvoir une nouvelle union en Europe. À ce sujet, voici le programme que nous vous proposons… >>

    A propos de Pierrick Tillet 3377 Articles
    Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.