Décembre 2008 en Floride. Un quart de la population du comté de Lehigh Acres, petite bourgade paisible qui avait prospéré sur le secteur de la construction avant d’être rattrapée par la crise de l’immobilier, s’est vu attribué [des bons d’alimentation|http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2582] pour pouvoir se nourrir. Vous avez bien lu ? Des tickets de rationnement ! Si, en 1939, on avait dit à la population française qu’elle allait être soumise à ce régime-là, nulle doute qu’elle aurait bien rigolé. Et sans doute aussi, il y a quelques mois, les habitants de Lehigh Acres en Floride (oui, oui, en Floride, la côte d’Azur américaine !). Sauf que dans ce dernier cas, on a même pas eu besoin d’une guerre pour en arriver là !
D’ailleurs vous-mêmes, qui lisez ces lignes, si on vous demandait comme ça à brûle-pourpoint : pensez-vous qu’il y ait des risques, d’ici la fin de l’année 2009, que vous ne puissiez plus vous nourrir sans tickets d’alimentation ? Ho ho ho ! Enfin bon, les salariés de Continental à Clairoix, les salariés des constructeurs automobiles en chômage technique chronique, les milliers de braves gens travaillant chez des prestataires de ces constructeurs, les milliers d’employés de l’immobilier de la construction, oui, tous ceux-là riraient sans doute encore un tout petit peu, mais plutôt jaune. Et pendant ce temps-là… Et pendant ce temps-là, nos chers dirigeants attendent le énième prochain G20 comme le messie. Celui-ci vient d’ailleurs de se réunir. Il a promis de prendre »<< les mesures nécessaires >> » contre la crise. Lesquelles ? On ne le saura pas. Comme aveu d’impuissance et de résignation, on peut guère mieux faire. Ne reste plus aux indécrottables optimistes qu’à s’accrocher aux répétitives prédictions de l’inénarrable Mme Soleil… euh non, Lagarde, qui vient cette fois d’annoncer cette reprise pour »<< courant 2010 >> ». Sans évidemment le moindre bifteck à se mettre sous la dent pour justifier son oracle. Et tout ce beau monde de mitonner fébrilement son énième « plan de relance ». En regardant le voisin d’un œil inquiet. Tandis qu’il ne se passe pas un jour, pas un seul, sans qu’une nouvelle pierre pourrie ne tombe de leur édifice vérolé. Aucun des milliards injectés depuis des mois pour colmater… pardon, relancer la machine n’a fonctionné. Aucun ! Freddie Mac, le pionner de la déconfiture, renfloué à la va-comme-je-te-pousse en 2007, vient d’annoncer une nouvelle perte de 23,9 milliards de dollars au quatrième trimestre 2008 et implore une nouvelle aide de 30,8 milliards de dollars supplémentaires pour survivre. Ce n’est plus de plans de relance dont a besoin le monde, mais d’un solide plan de sauvetage ! Un plan B, en quelque sorte. Or, vous remarquerez que pas un, pas un seul de ces grands décideurs n’a encore le moins du monde évoqué la possibilité de l’effondrement du système. Plus d’un an après le début du grand plongeon, pas un seul de ces zozos qui ait enfin anticipé la catastrophe possible, pas un qui ait dit, modeste : bon d’accord, on tente le tout pour le tout avec nos plans de relance et nos milliards. Mais au cas où, au cas malheureux où ceux-là, malgré tous nos efforts, seraient inopérants, eh bien, comme on est responsables et pas cons (rires), on s’est mis un petit plan B d’urgence sous le coude. D’ailleurs en voilà les grands lignes… Pas un seul ! Si d’aventure vous passez par Lehigh Acres en Floride, essayez donc de leur négocier quelques bons d’alimentation, au marché noir.