La seconde erreur de Jean-Luc Mélenchon

Il avait fait la meilleure campagne présidentielle. Une présence. Un projet bien ficelé. Avec juste un petit point faible : avoir privilégié les seuls travailleurs (le Smic à 1700 €) et un peu négligé les plus précaires (pas de revenu minimum vital). Lors des législatives, sa seconde erreur fut plus grave, qui l’amena à se focaliser sur son aversion pour Marine Le Pen.

Une sorte de syndrome « anti », un peu à la mesure de « l’anticapitalisme » d’un Besancenot, qui valut à ce dernier d’être à son époque l’opposant chouchou des médias du microcosme. C’est-à-dire un élément inoffensif du spectacle démocratique, tout juste bon à faire pisser de la copie médiatique.

Et de la copie sur le « match » d’Hénin-Beaumont, nous en eûmes à foison ! Direct du gauche par-ci, uppercut de l’extrême-droite par-là, coup bas en vache comme s’il en pleuvait… Bref, un match assez pénible avec à la fin un vaincu qui n’aurait jamais dû monter sur ce ring foireux.

Quand donc nos hommes politiques apprendront-ils qu’on ne lutte contre des idées qu’en valorisant les siennes, pas en tapant sur celles d’en face ? Quand donc nos hommes de gauche cesseront-ils de se comporter en irréductibles opposants, plutôt qu’en responsables au-dessus des mêlées ?

Un projet pour le meilleur, jamais contre le pire

On ne terrasse pas les idées régressives d’une Marine Le Pen, fussent-elles en passe de devenir majoritaires. S’il est une majorité de citoyens pour faire siennes de telles inepties, on ne peut plus rien pour elle.

La seule chose qui puisse inverser les tendances mauvaises, c’est de valoriser son propre projet, de le répéter à l’envi, de l’approfondir, de l’améliorer sans relâche par un contact étroit avec les électeurs.

L’humain d’abord, programme du Front de gauche, fut l’ouvrage politique le plus vendu de cette campagne présidentielle. Mais qui en entendit vraiment parler à Hénin-Beaumont et lors de toute cette campagne des législatives ?

Pour avoir oublié ce principe essentiel, Jean-Luc Mélenchon perdit son pari et se désiste désormais pour ce Kermel qu’il considérait il y a peu comme infréquentable. Au nom du « moindre mal ». Or il n’y a jamais de « moindre mal ». Le « moindre mal » conduit toujours au pire. Dont il retarde à peine l’échéance.

Jean-Luc Mélenchon a maintenant un peu de temps pour reprendre ses esprits et mûrir une stratégie plus saine. Mais on aurait tort d’oublier que c’est à son Front de gauche que l’on doit le seul projet politique structuré qui vaille. Et vaudra encore. Pour le meilleur, et non contre le pire.

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