
Les « bleus » sont arrivés ce matin avec une pelleteuse et ont tout démantelé. Le camp Gilets jaunes du rond-point d’Atlantheix près de Vannes n’existe plus, réduit à un tas de cendres encore fumantes sous la pluie.
Mais les Gilets jaunes, eux, sont toujours là ! Une trentaine, femmes, hommes, et même la petite de l’une d’entre eux, regroupés dans la boue autour de Fabien, leur « référent » local. Les mines sont graves. Les larmes pas loin.
Fabien :
« On avait beau s’y attendre, je suis dévasté ! »
J’essaie un petit mot d’encouragement : « Il ne faut pas se laisser « dévaster » par ce qu’ils font. Ça leur ferait trop plaisir. » Une jeune Gilet jaune, derrière moi, m’interpelle :
« Tu ne comprends pas, c’était notre seconde maison ! »
« ON CONTINUE ! ON RESTE ! »
Mais la colère revient vite. Se rendait-il compte, le préfet du Morbihan, qu’en donnant son ordre de destruction, il allait, non pas décourager les Gilets jaunes du rond-point d’Atlantheix, mais renforcer leur détermination ? Se rendait-il compte que sa pelleteuse était impuissante à détruire les liens forts qui s’étaient tissés entre les émeutiers pendant ce premier mois de soulèvement ? Le cri est unanime :
« ON CONTINUE ! ON RESTE ! »
Déjà fusent les premières suggestions d’actions, les idées de contre-attaque. Non, ils ne savent pas encore s’ils vont remonter un campement sur ce rond-point. « Mais on a tout prévu pour ne pas se perdre de vue et se tenir prêts », me confie l’un d’eux.
« Venez », dit Fabien, « on va prendre un café chez moi. » Rires dans l’assistance. « Chez lui », c’est dans un autre abri à proximité du rond-point…
=> Photo : non, pas de photo de mines éplorées, de cendres fumantes sous la pluie ou de bouillasse infâme laissée par la pelleteuse ; mais celle de visages heureux saisis il y a quelques jours sur le campement.