L’hommage du ministre Fillon à son voyagiste déchu

The Grotesque Singers - James Ensor « Je tiens à rendre hommage à cette décision courageuse de quitter le pouvoir »

Cet hommage appuyé est celui adressé par le premier ministre français François Fillon, à l’ex-président Moubarak, régulièrement élu par 90% des 10% de ce qui restait d’électeurs dans son pays. Tout fraîchement viré par les 90% d’abstentionnistes.

Et notre ex-touriste de luxe, jadis invité consentant en de pharaoniques croisières par son voyagiste déchu, d’en rajouter dans l’hypocrite cauteleux :

« Je prends acte des fortes aspirations du peuple égyptien à la démocratie, à la liberté, à la dignité. »

On notera en passant que cet hommage a été rendu lors d’un déplacement de notre vibrionnant représentant d’État en Arabie Saoudite. Où, comme chacun sait, la démocratie, la liberté et la dignité (des femmes) règnent en maîtres. Et où tout futur « danger islamiste » est écarté… vu qu’il est déjà au pouvoir, avec force pétrole béni dans les bénitiers pipelines !

Faut-il qu’il ait la tête trop farcie, notre ministre en goguette, pour avoir oublié les quelque 300 gugusses que notre ardent défenseur de« la cause de la paix » a fait dessouder par ses sbires casqués, avant de se résoudre à foutre le camp comme un vulgaire voleur ?

Obama, « le Gorbatchev du prétendu “monde libre” »

Mais bast, passons ! Le naufrage carnavalesque de tous ces puissants déconfits aurait sans nul doute ravi le peintre James Ensor (cf. tableau ci-dessus).

Car cette affaire égyptienne n’en finit pas de mettre à nu les masques grimaçants de nos dirigeants occidentaux, dépassés, malmenés, bousculés, s’échinant et suant à essayer de reprendre pied dans le spectacle, tandis que ceux de la place Tahrir glissaient entre les mains de leur suzeraineté comme anguilles récalcitrantes.

La palme du tourne-bourrique au président américain Obama soi-même, qualifié par Jean-Luc Mélenchon de « Gorbatchev du prétendu “monde libre” », tant il met d’ardeur à accompagner l’effondrement de son empire du Bien. En Irak, en Afghanistan, en Égypte…

Au train où les choses sont parties dans le monde arabe, Jean-Luc Mélenchon a tout lieu de se réjouir de voir appliquer sa devise, même en dehors de notre hexagone : « Qu’ils s’en aillent tous ! » ; et sa version encore plus cinglante : « Dégagez ! »

En attendant que notre peuple à nous ose enfin exiger un peu plus qu’une simple et illusoire « considération » à leurs dirigeants de pantalonnade, accrochons-nous en rêvant à cet autre tableau, autrement plus réjouissant :

celui de ces milliers d’Égyptiens, rigolards et graves à la fois, nettoyant, balayant, repeignant, briquant eux-mêmes la place de leurs exploits.

Nettoyage de la place Tahrir

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.