Le sauveteur et cette réfugiée accrochée à un morceau qui flottait

Ce sauveteur d’Open Arms, avec son geste, il appartient à ce qu’il y a de meilleur en nous. Il appartient à l’humanité.

Cette femme est la rescapée d’un naufrage en Méditerranée. Le mardi 17 juillet les sauveteurs d’Open Arms (Bras ouverts), une organisation espagnole, ont trouvé deux cadavres au milieu des débris d’une embarcation. Celui d’une femme et celui d’un enfant. Et cette femme, seule survivante, accrochée à un morceau qui flottait. On imagine dans quel état de détresse.

On ne va pas te raconter l’histoire de son canot. C’est tellement dégueulasse que je te renvoie à l’agence Reuters et à Juan Medina qui a pris la photo. L’article est en anglais mais, si tu as du mal avec la langue de Dickens, tu trouveras une machine à traduire en ligne.

À quoi bon commenter l’émotion qui se dégage de cette photo ? Laissons à chacun ses sentiments devant cette image si forte.

Je vais te parler de Macron

Je ne lui demande pas d’avoir le geste d’humanité de ce sauveteur. Je ne lui demande pas de délaisser sa cravate pour se mettre au boulot sur un bateau en Méditerranée.

Non, je souhaiterais juste que le président de la république française laisse les sauveteurs bénévoles faire leur devoir sans les gratifier de divers noms d’oiseaux. Sans les accuser d’être cyniques, corrompus, en cheville avec les marchands d’esclaves libyens ou que sais-je. Je souhaiterais qu’il ne parle plus comme un salopard.

Mieux encore, je souhaiterais que Macron ne se comporte plus comme un salopard. Que la France envoie ses avions de reconnaissance et ses navires avec ses marins partout où des réfugiés fuient l’enfer. Serait-ce « la grandeur de la France » d’avoir ce geste d’humanité ? Non ! Même pas ! Ce ne serait que le devoir humain de chacun de nous. Comme toi quand tu portes le cabas trop lourd pour la vieille carcasse de ta voisine. Sans en attendre les palmes académiques si elle était naguère institutrice. Sans en attendre la médaille du mérite agricole si y’a une botte de poireaux dans son cabas.

Porter les commissions de ta voisine

Soyons francs. Ça ne te coûte guère de porter les commissions de ta voisine jusque dans sa cuisine. Mettre à disposition deux-trois avions et quinze-vingt bateaux ne coûterait pas plus à la France.

Et qu’on ne vienne pas me parler d’immigration ou que l’on emploie pas d’autres grands mots qui globalisent, qui transforment les personnes, des êtres humains, en grande masse indistincte ! Laissons cela à l’histoire du nazisme.

Tu ne laisses pas crever ta voisine sur le goudron. Même si la vieille marche trop lentement. Même si elle a traversé la rue sans regarder. Même si le connard d’automobiliste qui l’a percutée roulait trop vite. Tu appelles le médecin, le Samu, les pompiers, tout ce qui est nécessaire. Elle gît en plein soleil et il ne faut pas la déplacer ? Tu lui fais de l’ombre avec ce que tu as sous la main, un drap ou un parapluie, en attendant le médecin pompier qui déterminera comment la mettre sur un brancard sans faire de dégâts supplémentaires.

Tu ne t’interroges pas sur l’avenir de cette masse de vieillards, sur le nombre de maisons de retraite nécessaires, sur « le coût effarant » du troisième âge pour notre pays. Tu ne cites pas Machin et Truc qui nous baratinent en permanence avec « la France qui vieillit », les chiffres de vieillards avec le détail hommes/femmes, la pyramide des âges, le nombre de myopies, d’arthroses et de cols du fémur, le pourcentage de personnes dépendantes.

Tu ne laisses pas crever la vieille dame au milieu de la rue au prétexte que la France serait envahie par les vieux. Point.

Regarde la photo. Les yeux de la rescapée ! Ce sauveteur casqué, avec son geste, il appartient à ce qu’il y a de meilleur en nous. Il appartient à l’humanité.

=> Photo : Juan Medina.


« Nous étions une vingtaine / Nous étions impatients / Nous étions tous vivants / Vivants et morts de trouille / Je pensais que prendre la mer / N’était pas l’épouser ». Général Alcazar (Patrick Chénière) chante « Outsiders ».

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Un citoyen ordinaire à la rencontre des personnes cabossées par la vie.