Donc, nous en sommes-là : faute d’accord pour une coalition de partis politiques, le président grec Papoulias envisage désormais << un gouvernement de technocrates >>. Le choix est clair : ou de nouvelles élections (démocratiques), ce que prévoit la constitution grecque, ou un gouvernement de technocrates mercenaires à la solde de l’Union européenne (UE), ce que personne n’aurait oser prévoir.
Quelques questions
Ce qui se joue aujourd’hui dans ce pays, c’est tout bonnement l’avenir de la démocratie, non seulement en Grèce, mais dans toute l’Europe. Ce que nous allons savoir dans les heures qui viennent, c’est si les mécréants osent sacrifier la démocratie à leurs intérêts.
J’ai posé quelques questions à mon ami Okeanos qui suit l’affaire sur place. Syriza, le parti « radical de gauche » (appellation contrôlée par notre microcosme médiatique transi), arrivé second du premier tour, refuse de prendre part à ce sauve-qui-peut paniqué de dernière minute.
Mais si en cas de nouvelles élections, Syriza parvenait à arracher une majorité presque absolue au parlement grec, quelle serait sa position ?
- Demanderait-il un retrait de l’euro, un retour à une monnaie nationale ou le maintien de son pays dans cette zone décidément bien sinistrée de la monnaie européenne ?
- Quid de l’attitude de Syriza quant au remboursement de la dette grecque ? Gel ? Annulation ? Renégociation ?
Le programme de Syriza
Okeanos m’a répondu en me détaillant le programme gouvernemental de Syriza :
- Annulation immédiate des mesures d’austérité, en particulier celles concernant les coupes dans les salaires et les pensions ;
- Annulation des dispositions du programme d’austérité qui exterminent les droits des travailleurs.
- Moratoire sur le remboursement de la dette. Et mise en place d’une commission d’audit sur cette dette.
- Révision immédiate de la loi électorale garantissant 50 sièges en prime au parti vainqueur.
- Annulation de la loi immunisant les ministres de devoir rendre des comptes.
- Contrôle public des banques et ouverture d’un audit sur leur situation.
- Mise en place d’une toute nouvelle coopération à l’échelon européen.
Ce « petit pays meurtri » en position de force
L’état de panique du mastodonte européen devant les imprévisibles entrechats du petit Poucet hellène prête à sourire. Tantôt « vipère au poing » comme le ministre allemand Schäuble assurant que la sortie de la zone euro de la Grèce, même pas mal ! Tantôt pontifiant comme le président de l’eurogroupe Juncker déclamant son << intention inébranlable >> de garder la Grèce en son sein.
Et que dire des réactions internationales pétrifiées, flagrantes jusque dans une outre atlantique << hantée >> par le spectre d’une nouvelle tragédie grecque, de ceux qui jugeaient il y a encore peu ce « petit pays meurtri » de vils tricheurs comme amusante quantité négligeable.
Juste un problème dans l’histoire : si un pays peut décider unilatéralement de s’exclure de la zone euro et a fortiori de l’UE, bien plus dur pour les autres, fussent-ils allemands, de l’exclure d’autorité. Que Syriza, parvenu au pouvoir du fait de nouvelles élections, s’amuse à mettre l’UE devant le fait accompli. Et c’est la souris qui fait la nique aux gros chats.
Bien sûr, demeure l’hypothèse non-exclue d’une mainmise technocratique sur la démocratie grecque. Mais alors, comment penser qu’un peuple au sang chaud, qui a osé moucher les deux partis institutionnels en se foutant comme de l’an quarante d’un quelconque « vote utile », resterait sans réagir ? Okeanos :
<< Dans le cas d’un gouvernement qui ne suit pas le vote du peuple, des émeutes seront à craindre, je pense. >>
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DERNIÈRE MINUTE (AFP, 15/05/2012, 15h47) : échec des négociations en Grèce, retour aux urnes plus que probable. La démocratie va-t-elle finir par l’emporter ? Suspens…
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