La présomption d’innocence de DSK vire au déni de culpabilité

On parle beaucoup, dans les milieux autorisés français, de la nécessité d’une grande prudence dans cette affaire DSK. On y réclame à grands cris de la retenue et l’on brandit à n’en plus finir le maître-mot de présomption d’innocence.

De là à évoquer la possibilité d’une machination, d’un complot, d’un coup monté, il n’y a qu’un pas que certains franchissent sans trop s’embarrasser de scrupules ni de nuances.

« Un coup monté » (Bernard Tapie)
« Un complot international » (Michelle Sabban, strauss-kahnnienne)
« Une machination » (Christine Boutin)

Et la présomption d’innocence de la victime présumée ?

Or, ce faisant, c’est la présomption d’innocence de la victime présumée, cette jeune employée du Sofitel de New-York, qui est sans vergogne remise en cause par inversion des rôles.

Car enfin, dans tous les cas, nous ne sommes pas là dans le simple registre du vague soupçon ou de la rumeur incontrôlée, mais face à des accusations précises pour des faits précis dans des circonstances précises à des instants précis.

Et qui plus est corroborés par des témoignages antérieurs tout aussi accablants pour le déjà ex-candidat à la présidence de la République. Comme celui de Tristane Banon, cette jeune femme qui s’épancha jadis sur ses démêlés musclés en 2002 avec notre « séducteur impénitent » (dixit ses proches).

On ne peut manquer de se rappeler l’affaire Woerth/Bettencourt où d’aucuns crièrent là aussi à la présomption d’innocence et au complot malgré des témoignages confondants. Moyennant quoi, l’infortunée ex-comptable de la milliardaire passa plus de temps dans les locaux de la police que le « présumé innocent » ministre.

Ultime rempart d’une caste malmenée autour de l’un des siens

Il est étonnant d’entendre un chroniqueur politique aussi affûté que Thomas Legrand (France Inter) répéter sans s’émouvoir n’avoir jamais constaté le moindre signe comportemental chez DSK laissant présager une quelconque attitude délictueuse de ce dernier à l’égard des femmes.

Thomas Legrand et ses confrères du microcosme médiatique peuvent-ils ignorer l’affaire Tristane Banon, l’aveu explicite de la mère de celle-ci, l’élue socialiste Anne Mansouret ?

N’avaient-ils jamais eu vent de la forte défiance d’un Jean Quatremer (Libération) et des précautions distantes de la députée Aurélie Filipetti  à l’égard de l’ex-directeur du FMI ?

Poussée à ce point d’aveuglement (involontaire, vraiment ?), la présomption d’innocence donne vite la sale impression d’un déni préventif de culpabilité. Ultime et détestable rempart d’une caste malmenée autour de l’un des siens.

Ne tombons pas dans l’excès inverse en envoyant précipitamment DSK au bagne. Laissons l’enquête et la justice se poursuivre, comme disent ceux-là mêmes qui n’hésitent pourtant pas à en fournir par avance les conclusions.

En attendant, les dégâts sont considérables et Marine Le Pen peut se frotter les mains.

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