
Au lendemain du dérapage verbal de Julie Graziani sur le divorce (interdit aux smicards), Clément Viktorovitch, éditorialiste, expliqua brillamment que ce dérapage relevait d’une stratégie de l’extrême-droite visant à la conquête du pouvoir.
« Si on est au SMIC, faut pas divorcer ! »
Les propos de Julie Graziani ne sont pas un dérapage. Ils s’insèrent dans une stratégie : celle de l’extrême droite. Ils servent un objectif : la conquête du pouvoir.
Décryptage, pour @cliquetv.pic.twitter.com/RSBfguWNRQ
— Clément Viktorovitch (@clemovitch) November 5, 2019
Le concept des fenêtres d’Overton qu’on ouvre pour faire passer sournoisement des idées radicales pour modérées et acceptables, la démonstration est brillante. Dans un premier temps, je fus même parmi ceux qui la partagèrent sur les réseaux sociaux.
Cette fâcheuse tendance à systématiser en concepts scientifiques ce qui n’est que pulsions maladives incontrôlées
Mais un temps de réflexion, le constat de la multiplication de tous ces dérapages verbaux qui touchent indifféremment l’ensemble du corps médiatique et politique, de Julie Graziani à Zineb El Rhazoui, en passant par tous les Pascal Praud, les Christophe Barbier, et jusqu’au président de la République (« ces Français qui ne sont rien »), montrent clairement que nous ne sommes pas dans une stratégie mûrement réfléchie menée par quelques éléments malins, mais dans une incontinence généralisée de toute l’élite défroquée d’un système en perdition.
Nous autres, êtres humains, avons une fâcheuse tendance à vouloir rationaliser nos égarements, à systématiser en concepts scientifiques ce qui n’est que pulsions maladives incontrôlées. Ce n’est pas pour rien que c’est un lobbyiste américain, Joseph Overton, qui a inventé le concept fumeux de fenêtres qu’on ouvre pour laisser passer les sales odeurs d’extrême-droite. Les économistes ont eux aussi systématisé l’activité capitaliste de captation de richesses au profit de quelques-uns en “science économique”…
« Le cerveau humain fournit un langage explicatif qui donne toujours une excuse, un alibi au fonctionnement de nos pulsions inconscientes » (Henri Laborit)
C’est le constat du désastre qui provoque les révolutions
Ce besoin de rationaliser nos pulsions incontrôlées pour nous convaincre de notre intelligence supérieure – et même, pour certains esprits soumis, de l’intelligence supérieure de leurs ennemis, ce qui justifie leur renoncement à toute forme de lutte – vole en éclat devant l’évidence de nos impuissances.
Non, l’incontinence verbale généralisée de nos élites actuelles n’est pas une stratégie de l’extrême-droite pour conquérir le pouvoir, elle est la preuve que les idées malsaines d’extrême-droite sont déjà au pouvoir, amenées non par notre intelligence supérieure, mais par sa déliquescence.
Cette incontinence ne va pas renforcer l’extrême-droite, c’est elle au contraire qui, généralisée, finit par provoquer la réaction de l’opinion, fait naître Sans-culottes ou Gilets jaunes. C’est le constat du désastre qui provoque les révolutions.