Dans quel état serons-nous lors de la présidentielle de 2012 ?

Qu’un pouvoir soit contraint d’annoncer de sévères mesures d’austérité en pleine campagne présidentielle en dit long sur l’état de désagrégation dans lequel sombre notre pays, prochaine proie toute désignée du cyclone systémique européen.

Passons sur le détail des mesures annoncées par le premier ministre Fillon, toutes plus ridicules et vaines les unes que les autres. De la contribution honorifique des plus riches à la taxe sur les sodas en passant par celle des mutuelles ou la mise au rencard du plan dépendance, la rigueur prônée illustre surtout la panique et le désarroi général ambiant.

C’est qu’il ne s’agit plus de redresser quoi que ce soit, mais de coller en sauve-qui-peut quelques leurres grossiers pour tenter d’amadouer les terribles agences de notation et éviter, retarder plutôt, le moment fatidique où elles nous marqueront du sceau d’infamie.

Faire le deuil d’un système en coma dépassé

Plus grave, le programme de l’opposition institutionnelle participe du même égarement pathétique. De Martine Aubry à François Hollande en passant par Ségolène Royal, tous débitent comme automates les credos réchauffés sur le retour à la croissance, sur l’emploi retrouvé ou sur la dette décrétée « ennemie » publique n° 1 de la France.

L’autre opposition ne parvient pas non plus à faire complètement le deuil d’un système en coma si dépassé que plus aucun remède de cheval, que ce soit du côté de la rigueur ou des plans de relance, n’a de prise sur lui depuis plus de trois ans.

  • On ne bouche pas les voies d’eau d’un navire en perdition, on ne le remet pas en vitesse de croisière avec une simple réforme fiscale, aussi vigoureuse et précise soit celle préconisée par Eva Joly ;

  • On ne contraindra jamais l’Europe du traité de Lisbonne à « faire capituler les marchés », ou à forcer la BCE à prêter directement aux États, comme l’intime Jean-Luc Mélenchon, pourtant le plus convaincant et le plus pugnace de tous.

Choc systémique contre train-train électoral ?

Quelles que soient les réformes alternatives proposées sur le tard, il est à craindre qu’elles n’auront pas le temps de se mettre en place avant le dénouement de ce que les lecteurs du Financial Times viennent d’appeler « la Grande perdition ». On peut aussi se demander dans quel état sera notre pays lors de la prochaine présidentielle, sur fond de retour en récession1 et de chômage galopant2.

Le problème, pour tous les acteurs de la vie publique, n’est plus aujourd’hui de multiplier fébrilement les propositions révolues en se décalquant péniblement d’une pensée unique obsolète. Il est d’admettre qu’il leur faut complètement revoir la logique de la production et de la distribution économique du pays.

Et que toute cette reconstruction a désormais toutes les chances de se faire sur des décombres. De fait et de par l’impuissance des élites finissantes, , il se pourrait bien qu’avant mai 2012, le choc systémique qui s’annonce vienne bousculer le train-train électoral, les prévisions ronronnantes des instituts sondagiers et le prêchi-prêcha besogneux de nos si puérils candidats.

Notes

1 Les premières estimations de l’Insee font état d’une stagnation du PIB au second trimestre 2011 (0%)… mais comme toutes les « premières estimations » de ce genre sont systématiquement revues en baisse, concluez !

2 Il n’y a pas que le chômage qui galope (juillet : +1,3%, soit 36 100 chômeurs de plus rien qu’en classe A). Le nombre de radiations de Pôle emploi a connu lui aussi un pic historique le même mois : 301 900 ! Ce qui en dit long sur certains abus de maquillage !

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