Confusion au sommet : de l’eau dans le gaz entre le pouvoir et sa police

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Trois derniers évènements survenus hier montrent une nette détérioration des rapports entre le pouvoir et son ultime rempart policier.

1. Le camouflet infligé par le directeur de la DGPN au préfet de police de Paris

C’est un véritable camouflet qu’Éric Morvan, directeur général de la police national (DGPN), a infligé à Didier Lallement, préfet de police de Paris. À peine ce dernier avait-il suspendu le policier agresseur de Sevran [photo], que le DGPN refusait cette décision. Mais cette rebuffade au sommet de la hiérarchie a une raison bien plus grave pour le pouvoir : c’est une fronde de policiers mécontents de la décision de suspension prise à l’encontre de leur collègue qui a poussé Éric Morvan à contredire grossièrement la décision préfectorale de suspension.

2. Un commissaire divisionnaire précipitamment sanctionné par le ministère de l’Intérieur

Le tout frais rapport de l’IGA (Inspection générale de l’administration) sur l’intervention des forces de police ayant entraîné la mort de Steve Caniço vient de rajouter de l’huile sur le feu des relations difficiles entre policiers et autorités. Selon l’IGA, la responsabilité du commissaire divisionnaire chargé de l’opération de maintien de l’ordre est largement engagé pour « manque de discernement ». N’écoutant que son courage [rires], le ministre Castaner s’est empressé de muter – exfiltrer ? – le vilain poulet, réussissant la performance de justifier la sanction… tout en réitérant son indéfectible soutien aux forces de l’ordre « mises en cause trop systématiquement ».

On notera que cette dénonciation et cette sanction ministériel arrivent à point nommé pour blanchir totalement le préfet de Nantes en reportant toute la responsabilité de la tragédie de la nuit du 21 juin sur le seul commandement policier. On notera enfin que le rapport de l’IGA contredit les conclusions de l’enquête de l’IGPN.

3. Une « marche nationale de la colère » policière le 2 octobre prochain

Voilà qui fait singulièrement désordre et ne devrait pas calmer le courroux des policiers contre leur hiérarchie et le pouvoir. Les principales organisations syndicales de police (Alliance, Synergie, Unité SGP police, syndicats de commissaires…) viennent d’appeler à « une marche nationale de la colère » le 2 octobre prochain à Paris, afin d’alerter sur la dégradation de leurs conditions de travail, la vague de suicides chez les policiers et, cerise sur le gâteau gouvernemental, pour défendre le régime de retraite des forces de l’ordre qu’elles estiment remis en cause par la réforme en cours.

Voilà qui n’arrangera certainement pas les affaires d’un pouvoir bousculé, et qui ne tient plus que par son ultime rempart policier. Or ce n’est pas les quelques miettes d’euros et les tartines de promesses que ne manquera pas d’octroyer à nouveau le gouvernement qui suffiront cette fois à calmer l’exaspération grandissante de feu les “gardiens de la paix” [soupirs]. Vous avez dit convergence des colères ?

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