Les cinq principes de la propagande de guerre, selon Michel Collon

Michel Collon, vous connaissez ? Belge, écrivain et journaliste indépendant, il livre sur son site Investig’Action des analyses au scalpel du monde dans lequel nous vivons. Sa dernière contribution m’a valu moult recommandations. Michel Collon y invite à détecter les « médiamensonges » sur la guerre que mène la France au Mali.

Pour sa démonstration, Michel Collon s’appuie sur cinq principes vieux comme le monde et utilisés à outrance, en boucle, par la propagande pour justifier toute expédition guerrière.

1. Cacher les intérêts

La lutte contre le terrorisme, la défense des peuples opprimés par l’islamisme, foutaise selon Michel Collon. Les intérêts à défendre dans la présente guerre du Mali, ce sont ni plus ni moins les gisements d’uranium, d’or, de gaz, de pétrole.

Si on avait vraiment voulu défendre les peuples opprimés, ça se saurait dit Michel Colon. Le Mali, le Niger et tous les autres pays voisins recèlent les plus formidables richesses naturelles. Exploitées dans des conditions << dégueulasses >>, aux détriments des populations locales, par des multinationales étrangères (Bouygues, Areva…).

Or ces pays demeurent les derniers des derniers en terme de développement humain : espérance de vie à 49 ans, alphabétisation à 28%, scolarisation 38% (Niger).

Et ce pillage éhonté est organisé avec l’aide de tous nos gouvernants qui se gardent bien d’obliger les multinationales à verser leur quote-part aux populations locales. N’est pas Chavez ou Morales qui veut (ou qui ne veut surtout pas).

2. Cacher l’histoire

<< Chaque fois qu’un dirigeant africain a voulu que son pays soit indépendant, que les richesses servent à la population, a voulu dire zut aux multinationales, eh bien il a été assassiné. >>

Et Michel Collon de citer les tragiques exemples de Patrice Lumumba, Thomas Sankara… Au Mali, les agissements de la France ont été de tout temps « honteux et abominables » ajoute-t-il. Des manipulations politiques criminelles à répétition pour promouvoir des dirigeants fantoches et préserver des intérêts particuliers.

En bref, la Françafrique dans tout son éclat, ce colonialisme sans foi ni loi par délégation.

3. Se faire passer pour les défenseurs des victimes

Car les dirigeants africains, les organismes transnationaux comme la Cedeao (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) ne sont que des marionnettes installées et maintenues artificiellement en place par l’ex-puissance coloniale, assure Michel Collon. Et de donner nombre d’exemples à ses allégations.

4. Diaboliser l’adversaire

Pas difficile de diaboliser l’adversaire, me direz-vous. Ces zozos forcenés d’islamistes intégristes se prêtent à merveille au rôle de repoussoir morbide. À croire que ces toqués ont été inventés pour l’occasion. D’ailleurs, ceux-là préexistaient-ils aux agissements très intéressés des anciennes puissances coloniales ?

<< S’il n’y avait pas la pauvreté au Mali, à cause des multinationales françaises, les gens ne seraient pas désespérés au point de se tourner vers ses fanatiques. >>

Il est vrai que nos va-t-en-guerre à nous ne se préoccupent guère de cohérence. Michel Collon pointe les relations ambigües avec le Qatar qu’on laisse acheter nos équipes de foot d’un côté et qui armerait les terroristes islamistes de l’autre.

5. Monopoliser et empêcher le débat

Ne reste plus pour masquer tous ces tortueux stratagèmes qu’à monopoliser l’information et à faire taire toute opposition, y compris bien sûr au Mali. Écouter nos médias parler aujourd’hui de l’intervention française au Mali révèle pourtant vite la grotesque machination à l’esprit averti qui veut bien entendre.

Mais qui veut bien entendre ? Placés devant le fait accompli par un Michel Collon, nombre de lecteurs tenteront de désamorcer ses propos accusateurs en disant que oui, tout ça, c’est pas nouveau, on le sait déjà, nananère…

Non seulement ces insinuations ne désamorcent rien, mais elles confirment qu’en l’occurrence la responsabilité — que dis-je, la culpabilité — de nos politiques est largement partagée par ceux qui les ont élus. Hollande, moins pire que Sarkozy, la lamentable expédition malienne en apporte un nouveau cruel démenti.

Aller plus loin :

Investig’Action, le blog de Michel Collon
– Anne Morelli, « Principes élémentaires de propagande de guerre » (Bruxelles, Labor 2006)

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