
Le coup d’État en Bolivie est désormais un fait acté. Le rôle des États-Unis dans ce coup de force, même pas dissimulé par les intéressés, ne fait pas l’ombre d »un doute. Mais l’Histoire ne s’arrête pas à une péripétie militaro-sordide dont il est grand temps de tirer les premiers enseignements.
Dans son dernier billet, le Grand jeu fait état des responsabilités et de la naïveté d’Evo Morales dans la détérioration de la situation politique de son pays :
- une attitude pas vraiment nette vis-à-vis d’une Constitution promue pourtant par Morales lui-même en 2009, limitant l’exercice du pouvoir à deux mandats maximum (avant d’être brutalement déposé, Evo Morales en était à son quatrième mandat) ;
- un contournement assez désagréable du résultat d’un référendum interdisant à Morales de passer outre à cette limitation à deux mandats maxi, ce qu’il fit cependant avec l’aide assez douteuse d’une décision judiciaire opportune.
- naïveté aussi d’avoir cru pouvoir faire confiance à des forces militaires et policières sans avoir jugé utile de s’assurer le soutien du commandement (erreur judicieusement évitée par Chavez, puis Maduro au Venezuela).
À l’actif d’Evo Morales, un bilan social impressionnant
Néanmoins, on n’oubliera pas que le bilan social du leader bolivien, avant sa déposition et après quatorze années de pouvoir, est particulièrement impressionnant :
- Prise de contrôle des ressources du pays au nez et à la barbe des grandes compagnies privées étrangères ;
- PIB multiplié par trois ;
- niveau de vie multiplié par 2 ;
- salaire minimum multiplié par 3 ;
- départ à la retraite fixé à 58 ans avec augmentation des pensions ;
- taux de chômage le plus faible d’Amérique (4,1%)
- budget santé augmenté de 173%, mortalité infantile divisée par 2, sous-nutrition infantile en baisse de 14% ;
- analphabétisme passé de 13% en 2005 à 4% en 2008…
D’importants soulèvements populaires ans le pays
Mais la géopolitique ne se joue pas sur du compassionnel et vous pouvez être sûr que les conjurés et leurs mentors de la CIA se foutent du bilan social de Morales comme de l’an 40. Pourtant, trois jours après le coup d’État, la situation n’apparaît pas vraiment stabilisée sur le terrain. Comme si une sorte de confusion et d’amateurisme régnait chez les mutins. L’auto-nomination d’une sénatrice de droite comme présidente par intérim dans une Chambre au trois-quart vide relevait plus d’une bouffonnerie de comédie que d’un plan minutieusement élaboré en amont.
Des nouvelles concordantes font par ailleurs état d’importants soulèvements populaires pro-Morales dans le pays.
Thousands upon thousands of Bolivians flood the streets of El Alto to resist the right-wing military coup and demand the return of their elected leader Evo Morales. #EvoEsElPresidente #ElGolpeDeEstadoEnBolivia #ThisIsACoup pic.twitter.com/bmsKqit0S3
— redfish (@redfishstream) November 13, 2019
?#EnVideo El Pueblo Originario Boliviano bloquean la ruta al Oriente Boliviano, en Colomi alzando su voz exigiendo por la restitución del hilo constitucional y la renuncia de la Golpista Jeanine Añez #EvoEsElPresidente pic.twitter.com/Xn2vs0T7eH
— ✌????? ?????????✌ (@rasta_celestial) November 13, 2019
Sursaut du désespoir ou mouvement populaire similaire à celui qui fit échouer le coup d’État de 2002 contre le président vénézuélien Hugo Chávez ? L’avenir prochain le dira. Mais une chose est cependant assurée : la Bolivie est aujourd’hui au bord de la guerre civile. Washington a décidément le chic pour semer le chaos partout où il intervient.