BNP, Crédit agricole et Société générale sont sur un bateau…

Les rumeurs ont bon dos ! C’est à chaque fois les rumeurs — malveillantes cela va de soi — qui sont incriminées lorsque les vilains marchés s’en prennent à nos fleurons bancaires. Et en ce moment c’est peu de dire qu’ils ne s’en privent pas, les vaches !

Pas qu’en ce moment, d’ailleurs. Prenez l’évolution des cours boursiers de nos trois principales institutions, par exemple. Paraît que ce sont les bourses qui reflètent et anticipent le mieux la vraie réalité. Eh bien, qu’on les prennent sur un mois, trois mois, six mois, un an, trois ans ou cinq ans, tout est au rouge cramoisi. (Voir le tableau)

1 mois 3 mois 6 mois 1 an 3 ans 5 ans
BNP -23,15% -45,99% -45,52% -47,71% -48,37% -65,15%
Crédit Agricole -26,81% -51,32% -56,41% -56,29% -58,34% -85,26%
Société Générale -23,05% -51,50% -58,28% -56,91% -63,21% -83,10%
Évolution cours boursiers banques (au 16/08/2011)

Pas de toubib miracle au services des urgences

Qu’est-ce qui les chatouille comme ça, nos fleurons ébranlés, qui ont réussi à perdre entre 65,15% et 85,26% de leurs valeurs boursières en cinq ans ?

D’abord leur appétit du lucre, comme l’a très bien fait remarquer un banquier soi-même. S’engager à environ 4,3 fois le PIB de leur pays, faut pas s’étonner que ça secoue sérieux au premier éternuement. À côté de ça, les profits toujours « records » dont ils nous éclaboussent tiennent du pipi de chat tout juste destiné à arroser la petite bande de margoulins à leurs commandes.

Aujourd’hui, ce n’est plus un éternuement, mais une véritable quinte de toux émétique qui secoue ce beau monde. Le vilain virus d’une dette publique carabinée. Grecque entre autres, mais pas que. La dette grecque, c’est juste l’arbrisseau qui cache une forêt d’emmerdes à venir.

Y a-t-il un médecin dans la salle ? Que nenni. Réunis ce weekend en Pologne pour ausculter le mal, nos Diafoirus ont juste fini par s’engueuler comme des furieux. L’américain Geithner donnant la leçon aux Européens, pour se voir moucher en retour, la petite troupe se quittant prématurément sans prendre la moindre décision, tel premier ministre grec ne sachant plus où donner de la panique.

Diagnostic vital engagé

Et les banques dans cette méchante galère ? Eh bien, partagées entre les épées de Damoclès de plus en plus nombreuses qui leur pendent au-dessus du nez et la logique folle de profits qui préside à leur existence, elles sont prises dans une spirale infernale qui les conduit à prendre des risques invraisemblables et de moins en moins mesurés.

L’alerte de 2008 n’aura servi à rien. La fuite en avant est repartie de plus belle, de plus en plus insensée. Tout juste sacrifie-t-on quelques boucs émissaires commodes au passage : Kerviel, Madoff, et ce Kueku Adoboli, trader présumé coupable de la banque suisse UBS. Ni escrocs, ni électrons libres indélicats, comme nous le démontre Paul Jorion à propos de l’affaire UBS. Mais représentants zélés d’un système devenu hors contrôle.

En réalité, le mal des banques ne date pas d’hier. Selon Paul Jorion, il est même inhérent à leur fonction depuis… 1885, quand fut relégalisée une spéculation interdite chez nous quelques trois siècles auparavant, sous un certain François 1er. Dérégulation sauvage qui a conduit, rappelons-le, à deux guerres mondiales et nous prépare aujourd’hui à un choc systémique aux conséquences encore inimaginables.

L’une d’elles tombe à l’eau, qu’est-ce qu’il reste ?

Restons sur notre terrain hexagonal et constatons les dégâts : la BNP, le Crédit agricole et la Société générale sont sur un bateau, l’une d’elle tombe à l’eau (vous allez voir que que ça va aller vite). Que se passe-t-il ? Rien, les deux autres, toutes les autres, vont suivre, voilà tout !

En attendant que font-elles ? Eh bien, certaines de ces indécrottables parient carrément sur le naufrage des autres ! Goldman Sachs, par exemple. Indécrottables, on vous dit ! Comme ces agences de notation qui dégomment maintenant ceux par qui elles sont nées. La régulation par les marchés est une régulation par le vide, liquidatrice, névrotique.

Pas grave, n’est-ce pas ? Le monde va son train-train peinard vers des lieux de Grande perdition. La veille de se précipiter aux guichets pour sauver ce qui peut l’être de leurs économies, les masses molles se demandent juste qui a gagné le jackpot du dernier Loto.

Et dans le zinc en chute libre, il se trouve toujours un ministre de service pour clamer sa « confiance » envers tout et n’importe quoi.

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.