Art & politique : Franck Longelin (1956- )

Franck Longelin, « Animal et territoire », 2002, huile sur toile, 81 x 65 cm

Franck Longelin est né à Boulogne-sur-Mer en 1956.

Autodidacte (avec un court passage aux Beaux-Arts) Franck Longelin a été essentiellement nourri par le « choc des œuvres » contemplées tant dans les musées que dans les livres. Ses initiateurs furent aussi, dans sa petite enfance, ses parents. Et le jeune Franck se distingue très tôt par un talent de dessinateur.

En 1978, à 22 ans, il installe son premier atelier Grande-Rue à Boulogne. Peintre abstrait de talent au début de sa carrière, il passe quelques années plus tard à la figuration.

En 2006-2007 l’artiste réalise “Exécutions picturales”, une série qui prend pour cible les images les plus contraires, selon l’artiste, à l’art du tableau : les images télévisuelles d’émissions grand public vécues en direct. Frank Longelin démonte pour reconstruire, ne voulant pas seulement casser. De surcroît, il fait la démonstration qu’en agissant sur les images, on pèse également sur la réalité, ce qui continue à être l’objectif de cet artiste engagé. C’est donc bien, dit-il, au sens propre comme au sens figuré qu’il faut entendre les mots “Exécutions picturales” car c’est en effet une certaine résolution picturale propre à l’artiste qui permet ici, dans une mise en scène quasi théâtrale, d’élever une série d’attentats fictifs au niveau d’œuvres d’art.

En 2009, la Bibliothèque Municipale des Annonciades de Boulogne-sur-Mer présente l’exposition “Le tableau retrouvé”, un ensemble significatif de l’œuvre de Franck Longelin :

  • Les guerres et les passions de la peinture (La Passion ; La Légende dorée ; Le coq de l’église ; Hermaphrodite ; Etoiles ; Exécutions picturales ; Paysages…),
  • Le tableau retrouvé : Van Gogh sur le chemin de la Ribaute ; L’atelier de Anselm Kiefer,
  • 44 portraits d’enfants (dessins originaux d’enfants accompagnés des peintures de l’artiste) relatifs au drame des enfants d’Izieu victimes de la Shoah et au nom de toute enfance assassinée.

« Le tableau retrouvé est un titre générique qui signifie, outre l’exhumation symbolique du tableau de Vincent Van Gogh (Sur la route de Tarascon) des cendres de la Seconde Guerre mondiale, la nécessité du geste de la peinture retrouvée. Par cette exposition, je veux montrer quelle est pour moi cette nécessité et aussi en quoi la peinture demeure aujourd’hui comme hier le médium premier de l’art. »

En janvier-avril 2020, Franck réalise les “Billets Longelin” une série de mille cent onze dessins (mille dessins de 10 €, cent de 100 €, dix de 1000 €, un de 10 000 €), sur des feuillets (papier ordinaire) de 21 cm x 9,8 cm, avec l’objectif de figurer la collision entre deux réalités jusqu’alors parallèles, la création d’art et sa marchandisation. Il s’agit d’une sorte de tautologie, puisque le prix affiché de l’œuvre est justement le sujet même de l’œuvre. « Je dessine ce que mon dessin coûtera à l’acquéreur. » Cette représentation de l’argent a ceci de particulier que la société libérale voudrait l’imposer sur tout objet et qu’elle y réussit. Notre présent est tel : rien ne doit échapper à la valeur d’échange, pire, à la valeur monnaie. C’est sans doute une imposture mais cette imposture couvre tout le réel.

Franck Longelin, « Vendredi tard » d’après Esprits libres, 2007, huile et fusain sur toile, 300 x 250 cm
Franck Longelin, « Sur le chemin de la Ribaute », 2008, huile et fusain sur toile huilée, 250 x 220 cm