Le Grand jeu : press… pressti… presstituée

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Que n’avait-on entendu pendant la campagne présidentielle à propos du piratage de Macron par les hackers russes ? L’ours revenait le couteau entre les dents menacer la démocratie et notre glorieuse presse indépendante montait courageusement en première ligne pour faire face, le stylo à la main, au danger. L’imMonde, le Fig à rot ou le Nouvel oups s’élevaient hardiment contre l’incarnation du Mal :

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Seul petit problème : il n’y a jamais eu de piratage russe. C’est ce qu’affirme Guillaume Poupard, le directeur de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes :

Selon le patron de l’agence de cybersécurité française, aucune trace du groupe de hackers russes accusés d’avoir fait perdre Hillary Clinton n’a été trouvée dans les « Macronleaks ».

Les hackers russes accusés d’avoir piraté le Parti démocrate pendant la présidentielle américaine ne sont pas responsables de l’attaque informatique qui a visé la campagne d’Emmanuel Macron à la veille du second tour.

C’est ce qu’a déclaré aujourd’hui Guillaume Poupard, le directeur général de l’ANSSI (Agence nationale de la sécurité des systèmes), dans une interview à l’Associated Press.

Le patron de l’agence française de cybersécurité affirme que l’enquête n’a trouvé aucune trace du groupe APT28 dans la diffusion de documents internes émanant de l’équipe de campagne d’En Marche ! dans la soirée du vendredi 5 mai, moins de deux jours avant le deuxième tour du scrutin.

Selon Guillaume Poupard, le hacking de la campagne de Macron, que certains avaient qualifié de « Macronleaks », était « si générique et si simple qu’il pourrait être l’œuvre de n’importe qui. On peut même imaginer qu’il peut avoir été commis par une personne seule, dans n’importe quel pays ».

Les partisans du futur président avaient dénoncé une tentative de déstabilisation de dernière minute.

L’intox est éventée et nos petits plumitifs morveux de la propagandastaffel sont bien embarrassés. Consigne a été passée, qui se résume en trois syllabes : omerta. Impossible de trouver la nouvelle dans les colonnes de notre héroïque presse libre et démocratique…

Si les vrais sites d’information (ZeroHedge, RT) n’ont pas ces pudeurs, il faut également noter que la presse régionale française sauve l’honneur. Ou plus exactement une partie d’entre elle, qui appartient au groupe EBRA. Le Dauphiné libéré, Le Progrès, Les Dernières Nouvelles d’Alsace, l’Est républicain ou L’Alsace ont tous relayé l’info :

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Un îlot de lumière dans un océan d’hypocrisie…

Et maintenant, que nous dit cette affaire sur le plan géopolitique ? Le général Pinatel — par ailleurs universitaire et auteur de livres sur les relations internationales — nous donne une première explication :

– Le directeur général de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) Guillaume Poupard a expliqué dans un entretien à AP qu’aucune trace de hacker russe n’avait été relevée dans l’attaque de l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron. Cette déclaration est-elle selon vous étonnante ou inattendue ?

Si Guillaume Poupard a pu le dire à la presse, c’est qu’il en a eu l’autorisation. Il devait probablement avoir cette information depuis quelque temps et attendre l’aval du gouvernement pour en parler. Il s’agit certainement d’une des retombées de la rencontre à Versailles entre les deux chefs d’État français et russe. Cela montre qu’il y a une volonté du président français de dégel avec la Russie. C’est clairement un signe. Je pense qu’Emmanuel Macron a été convaincu par Vladimir Poutine que la Russie n’avait rien à voir avec ces cyberattaques et que cela allait probablement dans le sens des convictions des services de renseignement français. Tout cela signifie qu’Emmanuel Macron a une volonté d’aboutir à une relation d’État à État et non pas de vassal des États-Unis face à la Fédération de Russie. C’est un petit pas qui ne passera sans doute pas inaperçu en Russie.

Peut-on imaginer que les propos de Guillaume Poupard mettent fin aux accusations envers la Russie ou le doute subsistera-t-il ?

– Cela prendra du temps. Les accusations politiques vis-a-vis de la Russie ont une source permanente : l’avis des anglo-saxons — aussi bien les Anglais que les Américains. Ils mènent une campagne de désinformation depuis des décennies vis-a-vis de la réalité russe. Ils n’ont jamais pris le virage de la Guerre froide pour des raisons stratégiques. Or, de nombreux médias français sont à l’écoute de ce qui se passe aux États-Unis et de ce que disent leurs médias. Les accusations ne vont pas s’arrêter comme ça. Il faudra qu’il y ait une période de travail de la part du président et du gouvernement pour expliquer que nous sommes sortis de la période antérieure vis-à-vis des relations franco-russes.

– Comment expliquer que cette déclaration d’une personnalité officielle française ne soit que très peu reprise par les médias du pays, eux qui avaient été si prompts à partager la rumeur d’une cyberattaque liée aux hackers russes ?

Les médias français ont été ces dernières années à la solde de la vision américaine en reprenant tout ce que leur donnaient les médias américains sans aucune vérification ou validation. Cette information doit les embêter un peu mais maintenant que cela a été dit, elle sera forcément reprise.

Notons que le général reste très pudique vis-à-vis de la presse, évitant de dire l’évidence : la MSN européenne est tout simplement vendue à la CIA comme l’a montré l’affaire Udo Ulfkotte en Allemagne. Mais laissons là les turpitudes de la presstituée pour nous élever un peu.

Ainsi, cette affaire confirmerait ce que nous disions avant-hier, à savoir un dégel des relations russo-européennes :

Assiste-t-on à un changement de direction de l’euronouillerie, désormais orpheline de son maître américain ? Si Macron dit tout haut ce que Merkel pense tout bas — et il y a de bonnes raisons de croire que le premier est le porte-parole de la seconde –, on est peut-être en train d’assister à un rééquilibrage du Vieux continent. L’avenir nous le dira… Mais on comprendrait mieux alors la flagornerie de la caste médiatique, cachant sous les épithètes dithyrambiques une redirection peu glorieuse pour elle.

Relevons que Poutine l’a joué très fine, laissant Macron sauver les apparences. Interrogés sur le « piratage russe » avant la fastueuse réception de Versailles, les porte-paroles du président français bottaient en touche, affirmant qu’on ne revenait pas sur le passé. Cette magnanimité de façade cachait une réalité plus crue : il n’y avait jamais eu de hackers russes.

Le Kremlin aurait pu pulvériser cette fable et démonter l’hypocrisie de l’Élysée. Fidèle à sa philosophie, Vladimirovitch a préféré laisser la porte ouverte et permettre à son interlocuteur de sauver la face. Un grand fauve indulgent avec un jeune lion disait Caroline Galactéros. Désormais, le lionceau a une dette…

=> Source : Le Grand jeu

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