HEUREUX

((/images/Franz.jpg|Franz|L))  » »Avec le temps va tout s’en va » » (dit la chanson). À commencer par les enfants quand ils sont grands. Et ça fait un grand vide dans la maison. Mais voilà, il leur arrive de revenir, heureusement, comme mes deux grandes ce week-end. Et la maison est pleine. — Je vais avoir un bébé.

C’est ce que nous a annoncé l’aînée, il y a quelques jours. Annonce si commune, tellement répétée et chaque fois si bouleversante. Elles sont là à la grande table, devant le café fumant et les croissants du petit-déjeuner, les deux grandes et la loupiote, la petite dernière pour la route qu’on se garde bien au chaud tant que le temps qui passe ne nous l’a pas enlevée. Plus la maman, le futur papa (et moi.) — En ce moment, il (ou elle) mesure trois centimètres et pèse trois grammes.%%% — Ouh la la ! Les regards incandescents dardent vers le ventre encore tout plat de la future maman. Je sais ce qu’elles vont faire dès le petit-déjeuner achevé : se réfugier dans la salle de bain, toutes les trois ensembles, et tenir un de leurs interminables  »pow-wow » dans des nuages de buée. Jusqu’au repas de midi. D’ailleurs, nous y voilà, elles, les trois sœurs, et la maman, resplendissantes. (Et moi, tout petit, surjouant le mâle de la meute en devisant avec le futur papa.) — C’est dingue, dehors le monde s’écroule, tout part à vau l’eau, et nous sommes heureux ! Soudain, mon esprit s’envole. Leurs conversations enflammées ne me parviennent plus qu’en bribes cotonneuses.  » »… monde s’écroule.. heureux… » » Pourquoi est-ce dans les périodes les plus difficiles que se font si palpables les petits bonheurs ? Pourquoi est-ce dans le drame et les tragédies que s’exacerbent les sentiments les plus forts ? Pourquoi ce souvenir si intense de sécurité et de chaleur quand la deux-chevaux de mon père filait en trépidant dans la nuit oppressante pour nous ramener au bercail ? Cocon si doux et rassurant (malgré les putains de courants d’air glacés qui traversaient la toile fatiguée du toit de la guimbarde !), soyeux comme le ventre de ma fille pour le petit être de trois centimètres et trois grammes qui va nous arriver.  »(Dehors, au moment où j’écris ces lignes, de nouvelles émeutes, terribles, éclatent en banlieue.) » Je vais souvent sur les sites des ami(e)s qui m’accompagnent sur ce blog. Eux aussi, derrière leurs colères, transpirent de ces désirs de bonheur, y font partager leurs passions. [Vieil anar|http://vitraux-auvergne.com] et ses vitraux, les voyages de [Céleste|http://celestissima.blog.20minutes.fr], les enluminures de [Zab|http://beatus.vir.over-blog.com], les photos de [Flopy|http://flopy.canalblog.com] (celle qui illustre ce billet, c’est elle). Même les plus douloureux, comme [Minium|http://blog.minium.fr] ou ce grognon de [Petaramesh|http://petaramesh.org], vous y réchauffent délicieusement$$Que ceux et celles que je ne cite pas ici faute de place me pardonnent (on les trouve dans les liens de la colonne de droite).$$.  »(Commentaires médiatiques sans surprise et impuissants sur les affrontements de la nuit à Villiers-le-Bel : « les voyous », « les meneurs », « la violence gratuite », « et maintenant, ils tirent ! »… avec toutefois un petit début de réflexion sur les dangers des couvercles obstinément posés sur les bouilloires. Il serait temps !) » Aux moments de grande lassitude, on rêve de se contenter de nos bulles, de se réfugier dans nos cocons, de se blottir au chaud dans notre coin. Et d’envoyer bouler le monde avec son cortège de malheurs, de désastres et de mauvais vents coulis. Certains d’entre nous le pourraient, d’ailleurs. Simplement, quelque part, on serait beaucoup moins heureux.

A propos de Pierrick Tillet 3377 Articles
Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.