MES CONDITIONS

À l’issue du premier tour des présidentielles 2007, le dimanche 22 avril, en comptant très large, la gauche a péniblement totalisé 10,62 % des suffrages exprimés, répartis sur six candidats. Son plus faible score depuis des années. Ridicule. Pourtant une bataille politique ne s’abandonne pas à la première défaite, un navire ne se quitte pas à la première voie d’eau. Pour ma part, je suis prêt à poursuivre l’aventure vers la recomposition d’une vraie force de gauche sociale, non libérale. Sous quelques conditions.

Lors de cette déjà précédente campagne, nous disposions de deux éléments essentiels : un programme qui se tenait à peu près, une base conséquente de militants convaincus. N’est-ce pas ces derniers qui sont allés chercher leur candidat à travers une pétition improvisée ? Mais nous manquions de trois autres éléments tout aussi importants : le temps, une organisation structurée, une communication efficace. ///html

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/// Il est clair que les prochaines élections législatives consacreront la situation héritée de l’élection présidentielle. Trop tôt pour que nous ayons le temps de nous préparer et d’y figurer honorablement. Allons-y par principe si nous voulons, mais ne rêvons pas. Du temps et de la patience, il nous en faudra si nous voulons nous enraciner de façon durable dans l’opinion publique. Préparons-nous dès maintenant pour des échéances plus lointaines. Ou pour être présents au cas où une brusque dégradation de la situation politique, sociale ou internationale de notre pays l’imposait. Nous disposons désormais pour cela de relais conséquents. ///html

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/// La recomposition de la gauche passe par la création d’un nouveau mouvement organisé. Ce mouvement qui nous a tant manqué pour acquérir une certaine visibilité, contraints d’improviser et de parer au plus pressé comme nous l’avons été. Cette nouvelle structure dépend de la bonne volonté de chacun, vrais socialistes, communistes de tous horizons, alternatifs, altermondialistes… Tous les corps et âmes déterminés sont conviés. Mais en aucun cas nous ne pourrons nous appuyer sur les vieux partis sclérosés de gauche genre PCF, LCR, LO ou Verts. Je tiens ces quatre organismes comme directement responsables de la débâcle du 22 avril 2007. Toute solution passant par une composition avec ces structures obsolètes est irrémédiablement vouée à l’échec. Je ne participerai personnellement à aucune tentative de faire du neuf avec du trop vieux. Notre nouveau mouvement devra être bâti sur le modèle d’une association régie par la loi de 1901 ouverte au plus grand nombre. Avec, par souci démocratique, une large initiative accordée par les statuts de l’association à ses membres. Ceux-ci auront par exemple, toute facilité pour convoquer quand bon leur semble, une assemblée générale susceptible d’apporter des solutions à des problèmes posés ponctuellement. Une sorte de référendum d’initiative populaire transposée au sein d’une association politique. Son nom ? J’ai proposé en son temps celui de  »Refondation sociale ». ///html

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/// Notre talon d’Achille, lors de la campagne qui vient de s’achever, aura été notre communication avec les électeurs potentiels. Point n’est besoin d’avoir une pléthore de porte-parole si aucun n’est audible. Il ne fallait pas être grand clerc pour savoir que les médias officiels ne nous feraient aucun cadeau. Comme prévu, ceux-ci n’ont consenti à cautionner que les opposants « acceptables » par le système (phénomène Besancenot, aimable icône protestataire médiatique, mais piètre et inoffensif politique). Nous sommes, nous, tombés naïvement dans leurs rets à l’image des premières prestations télévisées catastrophiques de José Bové. Nous n’avons pas su maîtriser l’instrument Internet, seule voie libre à notre disposition. Deux sites officiels pour commencer, n’en jetez plus ! Puis un seul (uni-e-savecbove.org), mais tellement foutraque, amateur, et rapidement monopolisé par des gens plus soucieux de leur communication personnelle (« mes » affiches, « mes » slogans, « mes » fêtes…) que de l’échange constructif avec la masse des indécis. La communication n’est pas non plus de se gargariser entre convaincus dans des meetings publiques aussi fournis soient-ils. Je dirais même plus : la communication politique consiste à s’adresser en priorité à tous ceux qui ne viennent pas aux meetings. Notre discours est resté bien trop général pour convaincre en particulier. L’antilibéralisme, l’exclusion, la précarité, autant de sujets creux si nous n’entrons pas dans les détails avec les intéressés. Il nous faut nous adresser successivement, patiemment, à chaque groupe social concerné. Les écouter avec un soupçon d’humilité et bâtir ensemble des solutions. Dans les signataires de la pétition pro-Bové, nombreux étaient les membres de métiers libéraux. À quel moment nous sommes-nous spécifiquement adressés à eux, les avons-nous écoutés, leur avons-nous proposé de résoudre avec nous leurs problèmes ? Quid du monde de l’éducation, des milieux de la santé, des paysans, des boulangers, des égarés … ? Pressé, José n’a pu consacrer de temps qu’aux banlieues sinistrées. Très bien, mais insuffisant. Pour le reste, nous nous sommes contentés d’organiser des « souks », fêtes gentiment potaches que les passants (les électeurs) regardent à distance, avec au mieux un sourire amusé, mais sans y participer. ///html

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/// Oui, je sais, nous manquions de temps. Maintenant, nous en avons ! Même si, en cette période difficile,  » »il y a des jours où l’envie taraude de cultiver son jardin » » (pour reprendre les termes de l’ami Langlois dans le dernier Politis), je me sens encore des fourmillements de retourner au turbin. Mais plus n’importe comment, pas dans n’importe quelles conditions …

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Un voyageur à domicile en quête d'une nouvelle civilisation.