Yanis Varoufakis et Alexis Tsipras (photo : AFP)
Étonnant le nombre de prétendus soutiens de Syriza à enterrer l’espoir Tsipras aussitôt l’accord conclu à l’arraché entre la Grèce et l’Eurogroupe vendredi 20 février. La Grèce, selon eux, se serait couchée devant la Troïka. Pourtant, à y regarder de plus près…
Revenons une dizaine de jours auparavant, le 10 février très exactement. Ce jour-là, Alexis Tsipras précisait les intentions de son gouvernement :
« Nous voulons simplement du temps et des facilitations pour mettre notre politique en place. »
Qu’ont obtenu Tsipras et les siens le 20 février ? Une poursuite des facilités bancaires accordées par la BCE pendant quatre mois, « explicitement désignée comme une transition vers un nouveau contrat », comme le note sur son blog Jacques Sapir.
Contre quelles infamantes concessions, à part celle de reconnaître — ça ne mange pas de pain — la réalité de dettes qu’ils ne rembourseront de toute manière pas ? Aucune autre au moment où sont écrites ces lignes. Et qui peut anticiper des termes du nouveau contrat à négocier dans quatre mois ?
Dans la partie de poker, les Grecs gardent la main
Bruxelles, porte-parole servile et même plus dissimulé de Berlin, avec la France et l’Italie dans le rôle des lèche-bottes de service, exige en contrepartie de l’accord de vendredi des propositions du gouvernement grec dès ce lundi 23 février.
Jacques Sapir a alors beau jeu de faire remarquer que c’est donc désormais, fait nouveau, à la Grèce de présenter ses propres propositions, et non plus à la Troïka de les imposer comme auparavant avec ordre d’y obtempérer illico.
Or qui, parmi les fossoyeurs fébriles de l’espoir Syriza se joignant avec un zèle troublant à l’hallali lancé par les médias mainstream du système, connaît les propositions que fera la Grèce ce lundi ? Il n’est pas impossible au demeurant qu’Alexis Tsipras et les siens craquent sous la pression, mais c’est une bien étrange attitude que de les condamner d’avance, surtout quand de surcroît on prétend être de leur bords.
Yanis Varoufakis, ministre grec des Finances, a pourtant été très clair en laissant entendre vendredi soir qu’il ne serait nullement question, dans ces propositions, de revenir sur les promesses électorales de Syriza concernant le volet social :
« Nous ne reprendrons plus de mesures imposées, concernant les retraites, la TVA, la Santé, par exemple, tout simplement, nos mesures n’affecteront pas l’équilibre budgétaire durant cette période. Si les institutions n’acceptent pas notre liste de réformes, alors l’accord sera mort et enterré. »
L’inévitable clash de la scène finale
À l’issue d’un accord tendu, il est de bonne guerre pour chacune des parties de revendiquer l’avantage, mais pour l’heure, la Grèce a bel et bien obtenu ce que son premier ministre réclamait : du temps.
Peut-être plus, d’ailleurs, comme le pense Jacques Sapir, pour préparer une sortie en bon ordre de la zone euro, que pour fixer les règles impossibles qui lui permettraient d’y demeurer.
Sur ce point, quelles que soient les propositions formulées lundi par Syriza, je campe pour ma part sur ma position de départ :
Lire > Leçon grecque : plus aucun changement possible sans clash systémique
La partie de poker arrive à son point culminant. Difficiles d’augurer les cartes que dévoilera le gouvernement grec ce lundi. Mais à constater le défaitisme navrant de commentateurs estampillés de gauche, n’est manifestement pas joueur de poker qui veut, avec les nerfs solides qu’il faut pour le devenir.
Post-scriptum :
Cette chronique a été mise en ligne le lundi 23 à 7h00 du matin. Nul doute qu’une actualisation interviendra dès les premiers éléments connus des propositions grecques.